Contenu
- Deux personnages principaux et narratrices, Jeanne Therrien, une universitaire, et Léa Therrien, une ancienne actrice, qui se remémorent leur vie personnelle et familiale.
« De Jeanne, dont l’école n’était située qu’à quelques milles de la maison, nous n’entendions rien dire, ni en mal ni en bien. Il était de tradition de respecter la maîtresse d’école, elle était donc respectée. » (p. 62)
« Léa attendait l’inspiration. Si le théâtre l’a contrainte à une certaine discipline, elle a continué d’oublier les anniversaires et d’arriver en retard. Lorsqu’elle a annoncé son mariage, papa a laissé échapper : “Léa fermière, pauvre gars!” Pourtant, le scénario ne s’est pas déroulé selon les prévisions. L’intérieur de sa maison n’est pas un modèle d’ordre, mais il est sûr que l’entreprise n’aurait pas prospéré si elle n’y avait mis du sien. Sans oublier les occasions où la Léa fantasque et indolente s’est effacée pour devenir une soignante attentive et résolue. » (p. 140)
- Nombreux personnages secondaires dans les retours en arrière, dont, Samuel, l’époux de Léa, chanteur et agriculteur, Colombe, jumelle décédée trop tôt, Fabrice, un voisin poète ayant séduit les jumelles, Corinne, jumelle qui perd la mémoire, Aurélie, l’autre jumelle, ancienne enseignante, leurs parents Artémise et Siméon, agriculteurs qui aiment éperdument leurs filles, Fulgence, le mari d’Aurélie, Adèle, la fille d’Aurélie, ainsi que Daniel et Éliane, les enfants de Léa.
« Il n’a pas eu le temps de démasquer Léa, devancé par Samuel Saint-Germain, le “petit rossignol de Saint-Amour” qui n’en finit pas de muer, ex-prodige que son professeur de chant exhibait autrefois de concert en séance, sous l’œil ému des mères et les rires de ses camarades. » (p. 30-31)
« Roses les joues de Colombe, la chair de ses lèvres, les aréoles qu’il devine sous le corsage enrubanné, la fleur qu’il se passent de l’un à l’autre en baisant chaque pétale. » (p. 31)
« Fabrice fait vibrer sa lyre de toc et murmure à l’oreille des nymphes des ersatz de paroles tendres. » (p. 33)
« Pourquoi ne pas avoir applaudi Corinne libérée, insouciante, belle malgré ses rides et ses cheveux trop longs, rajeunie dans les bras d’un beau garçon, intacte, ressuscitée, Corinne qui dansait comme elle avait dansé à quinze ans avec Fabrice, puis dans les bals de midinettes au pas des petits soldats. » (p. 37-38)
« Aurélie qui a fait un mariage de dépit à la suite d’une peine d’amour, qui a troqué la joie d’enseigner contre l’implication dans les bonnes œuvres, qui n’a connu de la passion que des espoirs de jeunesse déçus et quelques mois de rendez-vous clandestins avant de rentrer dans le rang. » (p. 38)
« Orphelins de leurs enfants, Siméon et Artémise s’étaient tournés vers la terre. Qu’auraient-ils fait d’autre? Silencieux, mais solidaires, loyaux. La vivacité d’autrefois émoussée, mais attentifs, angoissés ou joyeux selon les aléas de nos destins. » (p. 91)
« J’ignore si les infidélités de Fulgence, qu’Aurélie soupçonna tôt, dérivaient d’un éloignement causé par les malaises de grossesses et par l’accaparement des enfants, ou d’une nostalgie de mâle qui regrettait les nuits insouciantes de sa vie de garçon et se laissait entraîner dans les bars de danseuses nues pour se prouver que rien ni personne ne pouvait l’enchaîner. » (p. 109)
« Adèle réussit grâce à un sens de l’organisation hérité ou appris, à son tact naturel et, surprise! aux responsabilités dont Fulgence l’investit en lui confiant la gestion de ses entreprises immobilières. » (p. 127)
« “Daniel, pourquoi m’as-tu emmenée ici? Oh! je trouve charmant de dîner en compagnie d’un galant jeune homme. Tout est parfait. Mais j’ai eu l’impression, l’autre soir, que tu ne m’invitais pas seulement pour parler du Festival du film.” » (p. 132)
« Éliane est trop bourgeoise, ordinaire, elle a les yeux trop rivés sur son train-train quotidien pour répondre aux attentes de sa mère. » (p. 136)
- Roman à caractère biographique mettant en scène deux des sœurs jumelles Therrien, qui cherchent à donner vie à leurs souvenirs, à tisser des liens entre les générations et à panser les blessures d’un drame caché survenu bien des années auparavant; schéma narratif atypique étant donné le nombre de retours en arrière, de souvenirs ne suivant pas un ordre chronologique et le changement de narratrices; thèmes variés (p. ex., famille, souvenirs, amour, identité) qui incitent le lectorat à réfléchir aux liens entre les membres d’une fratrie.
- Mise en page simple; œuvre répartie en huit chapitres numérotés et titrés; éléments graphiques (p. ex., italiques, points de suspension, guillemets, parenthèses, notes de bas de page) facilitant l’interprétation du texte; liste des autres œuvres de l’auteure, dédicace et citations au début des chapitres un, trois et quatre; table des matières à la fin; extrait sur la quatrième de couverture.
Langue
- Registre de langue courant dans l’ensemble de l’œuvre; mots moins connus (p. ex., jachères, systoles, liturgies, génuflexions), mots et expressions en anglais (p. ex. dealers, chum, garage sales, Roses of Picardy, jet-set, never mind), mots et expressions en latin (p. ex., Offertarium, alma mater, mater dolorosa, jocare) et mots du registre familier (p. ex., snoreaudes, icitte, c’ui-là, pouèsies, sloche, môman) compréhensibles à l’aide du contexte.
- Phrases de base, phrases transformées et phrases à construction particulière; abondance de phrases interrogatives soulignant la réflexion des narratrices, qui se remémorent le passé et tentent de comprendre certains événements.
« Corinne ne revint qu’en 1946. Une fois sa jambe rafistolée et l’Allemagne conquise, pas question de lâcher prise. Une claudication légère acquise sous le feu des bombardements ne pouvait que faire bonne impression auprès de messieurs les officiers. On avait besoin de chauffeurs pour véhiculer d’une ville en ruine à l’autre le haut et le bas commandement, on avait besoin de dactylos dans les bureaux de fortune qui poussaient sur le territoire allemand. » (p. 72-73)
« Combien de costumes n’a-t-elle pas cousus, d’arbres de Noël décorés, de meubles repeints? Comment comprendre son attitude envers Daniel? Ne peut-elle accepter qu’il ait choisi une carrière qui ne correspond pas aux souhaits de sa mère? » (p. 140-141)
- Figures de style variées (p. ex, métaphore, énumération, comparaison, personnification, hyperbole) qui rendent le texte plus imagé et permettent au lectorat de visualiser certaines scènes.
« Sur le pas de la porte, sa sœur contemple la flamme des feuilles d’automne. » (p. 15)
« Tante Flavie a débarqué tambour battant avec ses tartes à la farlouche, ses cahiers de mots croisés et son répertoire de blagues. » (p. 21)
« Corinne a lancé ses godasses hors champ, esquisse un pas de danse, la jambe en l’air, cheville fine et mollet rond, le pied en pointe comme une ballerine. » (p. 71)
« Son regard s’échappait vers des images dont il restait seul témoin : avant-hier, il tendait les bras vers Artémise en voile blanc; hier, sa mariée s’évanouissait, pâle entre les draps, sa mariée déjà en allée. » (p. 76)
« Ce soir-là, on avait dansé comme des enragés, comme si c’était la dernière fois de notre vie. C’était juste la dernière fois avant le carême, mais, à vingt ans, six semaines, c’est l’éternité. » (p. 99)
- Prédominance de séquences narratives, entrecoupées de quelques séquences dialoguées, permettant de comprendre la relation entre les personnages, de témoigner des interactions entre eux et de refléter les souvenirs des personnages principaux, leurs jugements et leurs interrogations.
« Corinne passait des après-midi au bord de la mer à ²recharger ses batteries², qui pourtant me paraissaient fonctionner gaillardement. Elle appelait ces séjours comme accompagnatrice un « travail-vacances ». Une fois ses ouailles casées dans leurs chambres respectives, les inévitables réclamations réglées, les renseignements essentiels fournis, il lui restait quelques heures libres entre les excursions. » (p. 144)
« – Laisse tomber, je vis à ma façon, je te fais pas la morale. Je pourrais. Sans mentionner ce que p’pa en penserait…
– C’est pus de ses oignons.
– Par respect pour toi-même, comment peux-tu te prêter à tout un chacun?
– Oh! tu te trompes! Je ne me prête (remarque, je ne me donne pas) qu’à celui que je choisis. Je respecte mes désirs. » (p. 145)
« – Hum… qu’est-ce qu’il pourrait se passer? Corinne est inaccessible. Il y a des vérités aussi perdues qu’une pierre tombée au fond d’un ravin.
– Comme quoi?
– Maudit, Léa, penses-tu qu’elle savait que Colombe était enceinte? Je veux dire… avant, quand il était encore temps de la sauver? J’ai voulu lui arracher la vérité, une fois. Elle s’est dérobée, comme d’habitude. “Rien n’est juste”, c’est tout ce qu’elle a trouvé à dire.
– Jeanne, on le savait toutes! Enfin, on s’en doutait, on voulait pas savoir, on se détournait, comme si en regardant à côté, la réalité en face allait disparaître. » (p. 179)
Référent(s) culturel(s)
- Très nombreux référents culturels de la francophonie canadienne (p. ex., Saint-Benoît-du-Lac, Saint-Alban, Montréal, Saint-Joseph, Sorel, Émile Nelligan, Arthur de Bussières, Louis-Joseph Doucet, Cirque Éloize) et internationale (p. ex., Jules Verne, Marcel Proust, Bécassine, D’Artagnan).
- Référence à des magazines (p. ex., Décormag, Châtelaine) et à des œuvres littéraires (p. ex. Le vaisseau d’or, Le petit Chaperon rouge, Antigone, Les malheurs de Sophie, Le Survenant).
- Mention des quintuplées Dionne.
Pistes d'exploitation
- Suggérer aux élèves, réunis en équipes, d’analyser le rôle social et familial de la femme à travers le vécu d’Artémise et de chacune des quintuplées Therrien, qui ont toutes un parcours différent. Les inviter à présenter leur analyse au groupe-classe par l’entremise d’une carte conceptuelle.
- Demander aux élèves de lire le passage ci-dessous, puis de rédiger un bref texte faisant l’éloge d’un intérêt qu’ils ont (p. ex., sport, randonnée, animal domestique) et pour lequel la technologie ne demeure qu’un piètre succédané. Former des équipes de quatre, puis les inviter à lire leur texte aux membres de leur groupe.
- « J’ai appris à naviguer dans Internet, mais trop de labyrinthes m’échappent. Je n’y trouve pas la plénitude qu’apportent le poids d’un livre entre les mains, le plaisir de vérifier l’année d’impression, la table des matières, un en-tête de chapitre, une notice biographique, celui de fureter entre ses pages à la recherche de la phrase-sirène qui me charmera, m’invitera à poursuivre sa lecture et à découvrir ses musiques. Tant que je serai ainsi séduite, il me semble que je ne serai pas prête à mourir. » (p. 129)
Conseils d'utilisation
- Encadrer la lecture du roman dans son contexte sociohistorique pour mieux comprendre le traitement de sujets tels que le rôle de la femme et « l’achat de petits Chinois » (p. 60).
- Accorder une attention particulière aux sujets sensibles dont traite le roman, soit la fausse couche, une relation amoureuse entre cousins germains, la mort, le cancer et l’avortement.
- Inviter les élèves à lire l’essai Les jumelles Dionne et l’Ontario français (1934-1944) de Gaétan Gervais, dont la fiche pédagogique se trouve dans FousDeLire.
Ressource(s) additionnelle(s)
- IDÉLLO.org, ressources éducatives en ligne, 9e à 12e année, Série : Vraiment Top – Top sur les jumeaux et les jumelles.