Contenu
- Œuvre autobiographique mettant au premier plan l’auteur-narrateur, un adolescent passionné par la lecture et la musique qui étudie au collège classique.
« Lorsque je suis arrivé au collège, j’aimais lire des ouvrages d’histoire et de géographie. Pour qu’un roman m’intéresse, il fallait que j’y trouve des épisodes historiques, ou qu’il se situe dans une époque qui m’était chère, celles de Richelieu, de Louis XIII, ou de Louis XI; le cardinal La Balue dans sa cage me faisait pleurer. » (p. 72)
« Au concert, j’aime que le pianiste saute une mesure, ait des langueurs évidentes; ses rubatos ne me choquent jamais. J’aime une voix qui, soudain, se brise ou qui, parfois, dans l’aigu, vibre et fausse un peu. Je tiens ce goût du grésillement de l’aiguille sur le disque vieilli. Les exécutions parfaites d’aujourd’hui m’ennuient. » (p. 115)
« Autre raison de mon désir de quitter la maison : je grandissais, devenais peu à peu un homme. J’avais honte de ma virilité, de ma moustache naissante, de ma voix, de la sexualité qui s’éveillait résolument en moi et dont je devinais qu’elle ne serait qu’une source d’ennuis, avec des éclairs, rares, dans le ciel. » (p. 170)
- Œuvre comprenant de nombreux figurants, notamment des enseignants du collège, dont les noms font partie des intitulés de plusieurs chapitres, ainsi que des amis, tels que le père André Denis, enseignant de français et de latin et pianiste doué, Raymond Tremblay, fervent lecteur et amateur de musique tout comme l’auteur, Robert Vigneault, un étudiant externe, Guy Lafond, également un étudiant externe, doué au piano et grand ami, le père Oscar Langlois, un prêtre qui enseigne la Méthode, le père Germain Lemieux, enseignant dans la vingtaine, ainsi que le père Lorenzo Cadieux, passionné d’histoire et fondateur de la Société historique du Nouvel-Ontario.
« Chacun de mes livres est marqué au sceau de la musique. Si je n’avais pas connu le père Denis, cela aurait quand même été, puisque telle est ma nature, mais d’une façon, et d’une source, différentes. Lorsque, assis à mon banc, au premier rang, près de la porte, j’attendais avec mes camarades l’arrivée du père Denis, je ne pouvais deviner la signification de sa présence parmi nous. » (p. 24)
« Tremblay (Raymond) est, je crois bien, né un livre à la main. Je l’ai perdu de vue depuis de nombreuses années. La distance spirituelle est parfois infranchissable. Mon ami d’enfance et curé quelque part en Ontario… » (p. 41)
« Le troisième larron s’appelait Robert Vigneault. Il était natif de Sudbury, donc externe. Il arrivait à l’heure du premier cours et rentrait après l’étude du soir. » (p. 43)
« Il me reste Lafond, dont l’affection m’est nécessaire autant que la vie même. Je ne peux la concevoir sans lui. » (p. 47)
« Le père Langlois, le père Lemieux guidaient nos pas. Nous leur soumettions nos textes, critiques, méditations sur des pensées d’auteurs classiques, variations sur des thèmes imposés. Ils corrigeaient nos pataquès, nous facilitaient l’art de penser. » (p. 95)
« Le père Cadieux et le père Courteau formaient équipe, l’un homme d’action et de charme, l’autre, de dossiers et de correction d’épreuves. De conserve, ils décidèrent de fonder, depuis leurs précieuses archives, la Société historique du Nouvel-Ontario. » (p. 163)
- Mémoire autobiographique suivant un ordre chronologique, dont les thèmes de l’apprentissage, de la religion, des arts et de la culture, ainsi que celui de la découverte de soi, permettent au lectorat de s’interroger sur la différence entre l’expérience scolaire de l’auteur et la leur; retours en arrière sous forme de souvenirs d’enfance de l’auteur.
- Mise en page simple; œuvre divisée en six parties et quinze chapitres titrés représentant chaque année d’étude au collège classique; éléments graphiques (p. ex., parenthèses, guillemets, italiques pour marquer le titre d’œuvres et des mots de langue étrangère, acronymes, notes de bas de page) facilitant l’interprétation de l’œuvre; liste d’œuvres de l’auteur, dédicace et citation au début du livre; table des matières à la fin.
Langue
- Registre de langue courant dans l’ensemble de l’œuvre; œuvre comprenant une complexité langagière élevée due aux nombreux mots moins connus (p. ex., syntaxiste, poubellistes, déréliction, spoliés, ignatiennes, subcarpathique, sotériologiques), de mots et expressions en latin (p. ex., vox populi, Tarde venientibus ossa, Sub Pontio Pilato, faber dixit, tonsor, eques, Pater), de mots faisant partie du champ lexical du catholicisme (p. ex., messe, missel, soutane, Épître, Évangile, Prêtre, Verbe, etc.), d’expressions en anglais (p. ex., Steady as a rock, Easy as pie, Play this again, will you) ainsi qu’en allemand (p. ex., Und wenn du das nicht hast, Dieses Stirb und Werde, Bist du nu rein trüber Gast, Auf der dunklen Erde).
- Phrases de base, phrases transformées et phrases à construction particulière; prédominance de phrases déclaratives, permettant à l’auteur de relater des événements ayant marqué son vécu; emploi de l’imparfait et du passé simple de l’indicatif, propre à un ouvrage autobiographique.
« Le premier matin de la rentrée était un lundi. La veille, avant l’étude du soir, j’avais vu maman partir, la voiture (un cabriolet Dodge, qu’elle conduisait à une lenteur exaspérante) s’engager dans l’allée de peupliers qui menait à la rue Notre-Dame. Je restais planté sur le trottoir, le collège derrière moi, la ville devant, deux inconnues. Selon mon habitude, je regardais le ciel, au loin. C’était celui de Sudbury, capitale du nickel, dont j’appris, au cours des ans, à suivre les variations. Bien que toujours sur fond d’acier, comme d’un horizon après l’éclatement des obus, il vivait intensément. » (p. 9)
« Albert Paiement m’invita chez lui, afin d’écouter, en compagnie de ses sœurs, l’Introduction et rondo capriccioso de Saint-Saëns. Était-ce Heifetz? Je me laissai entraîner par ces mélodies qui n’en sont pas, par les appels du rythme libre. J’enviai le clair génie de Camille Saint-Saëns et m’empressai de le mieux connaître. » (p. 98-99)
- Figures de style variées (p. ex., hyperbole, litote, métaphore, énumération, expression imagée, personnification, comparaison) permettant de visualiser et de mieux saisir les explications de l’auteur.
« Le clivage entre les quatre premières années du cours classique et les quatre dernières était aussi profond que les gorges du Verdon. » (p. 19)
« Janine Dorland, suicide; Claude Thériault, emporté comme un fétu; Alice Parizeau, le cancer; Robert Choquette, l’âge. » (p. 48)
« Dans l’ensemble, nous étions de braves moutons. » (p. 98)
« J’aimais les glissements tragiques des trombones, les appels voluptueux du saxophone, la voix aristocratique de la clarinette. » (p.112)
« Je serais comme Jonas dans sa baleine ou Jacques Cartier sur le vaste océan, ou comme un passager de la Nef des fous. » (p. 236)
- Multitude d’expressions figurées et idiomatiques permettant d’apprécier le style de l’auteur.
« Les pères devaient trouver bizarre et rire sous cape d’entendre Tremblay et moi discuter […] » (p. 84)
« Rien ne pue au nez d’un jésuite comme la goinfrerie. » (p. 105)
« […] je me retrouvais seul au réveil comme au coucher, en plein centre d’un maelström de violence. » (p. 123)
« Il n’admirait pas les écrivains ²qui vont chercher midi à quatorze heures² ». » (p. 169)
- Séquences descriptives et narratives nombreuses permettant de suivre le quotidien de l’auteur durant ses longues années d’études.
« Le vieux collège n’avait de charme qu’à son extrémité. L’architecte improvisé avait eu l’idée de dresser au bout du rectangle trois galeries de bois, superposées, qui, peintes en blanc, évoquaient, on ne savait trop pourquoi, la proue d’un bateau. » (p. 11)
« Le père Langlois corrigeait nos travaux avec une probité extrême, tâche ingrate entre toutes. Versions et thèmes latins, nos ânonnements en grec, nos énormités en français, nos erreurs de faits en histoire ou en géographie, nos inattentions, sans parler des mathématiques et des leçons de choses, tout était passé au crible. » (p. 96)
Référent(s) culturel(s)
- Nombreuses références aux personnalités et au contexte sociohistorique de la francophonie ontarienne des années 1930 et 1940.
- Référents fréquents à des noms d’auteurs français (p. ex., Zola, Corneille, Claudel, Montaigne, Dumas, Balzac, Marivaux, Racine, La Fontaine, etc.).
- Référents fréquents à des films, des livres et des pièces musicales.
Pistes d'exploitation
- Inviter les élèves à rédiger une dissertation au sujet de la place qu’occupent les arts et la culture dans le développement identitaire d’un adolescent. Animer une mise en commun afin de leur permettre de présenter leur travail au groupe-classe.
- Demander aux élèves, regroupés en équipes, de discuter de l’extrait suivant afin de déterminer s’ils sont d’accord ou pas avec les propos de l’auteur : « La jeunesse cherche toutes les occasions d’oublier le sablier du temps. Aujourd’hui, je nous revois ainsi qu’un immense troupeau d’oies, collées les unes aux autres, dont certaines ne quittent le triangle d’origine qu’afin d’y mieux revenir. Nous avions besoin de cette camaraderie. Ensemble, nous priions, riions, bataillons d’hoplites apprenant à manier les armes de la vie. » (p. 93). À la suite de la discussion, les inviter à formuler un énoncé au sujet de la camaraderie moderne, puis les inviter à faire part de leur travail au groupe-classe.
- Animer une discussion sur l’énoncé suivant : « Mon amour de notre langue venait de mon besoin, enfant, de m’accrocher à une étoile, comme au croissant de la lune, et d’être emporté à travers le cosmos. J’en suis devenu un voyageur fidèle. » (p. 26) Proposer aux élèves, réunis en équipes, de choisir une pièce musicale instrumentale qui servira de trame de fond pour leur rédaction d’une ode à la langue qui pourra être lue ou chantée devant le groupe-classe.
Conseils d'utilisation
- Accorder une attention particulière aux propos et aux jugements que l’auteur-enfant portait envers les employés de la mine (p. 12-13) et d’une femme en couple avec un Chinois (p. 66), en mettant l’accent sur l’importance d’éviter les histoires uniques et les généralisations.
- Aborder le sujet de la découverte de la sexualité, de la virginité et de la masturbation (humaine et chevaline) comme faisant partie du développement de l’humain.
- Accorder une attention particulière aux termes à connotations racistes employés pour décrire des situations, personnes ou groupes (p. ex., négritude, négroïde, Jaunes, anglophones envers les francophones).
- Sensibiliser les élèves à la présence du châtiment corporel dans les écoles à l’époque décrite dans l’œuvre.
- Inviter les élèves à lire la trilogie d’Hélène Brodeur, soit La quête d’Alexandre, Entre l’aube et le jour, Les routes incertaines, qui met en scène un personnage qui, lui aussi, poursuit ses études et dont les fiches pédagogiques se trouvent dans Fousdelire.