- Pièce de théâtre tragique divisée en trois actes, suivant l’ordre chronologique, mais comptant quelques retours en arrière.
« C’est l’automne. Le décor, sur lequel le rideau s’ouvre, représente une arrière-cour située dans un faubourg, quelque part dans la ville. » (p. 15)
« Même décor qu’au premier acte : c’est le soir. C’est un sombre soir d’automne.
[…]
Au cours de ce dernier acte, les personnages sont vêtus plus chaudement; il faut même qu’ils donnent l’impression d’avoir un peu froid. Après un certain temps, Ciboulette fait son entrée par le fond. Sa démarche est lente, son regard n’est plus illuminé par la ferveur du début. » (p. 121)
« CIBOULETTE – […] Tu te rappelles au mois de juillet? Y arrivait de voyage un soir; y était tout en sueurs, sa chemise était ouverte sur sa poitrine; y est venu s’asseoir avec nous autres dans l’escalier de Tit-Noir, il nous a regardés un après l’autre avec des yeux pleins de lumières et jusqu’à la nuit il nous a raconté ses aventures. » (p. 123)
- Personnages principaux composés d’adolescents mêlés à un réseau de contrebande de cigarettes américaines (p. ex., Ciboulette, Tarzan, Passe-Partout); personnages secondaires appartenant surtout au monde policier (p. ex., Le chef, Ledoux, Roger) et voulant démanteler ce réseau.
« CIBOULETTE […] – […] Je m’appelle Ciboulette et je suis une petite fille des rues, pas plus. Mes parents sont pauvres et m’aiment pas beaucoup mais ça m’est égal, j’attends plus qu’ils me fassent vivre. J’ai seize ans, je travaille à la manufacture et je m’en fiche parce qu’en même temps je suis contrebandière, je fais partie d’une bande et j’ai un chef, un chef qui est plus fort que tout, un chef qui a peur de rien et qui rendra tout le monde de la bande heureux. » (p. 29)
« LE CHEF – […] Ce Tarzan dont ils parlent à tour de rôle semble leur inspirer beaucoup de respect.
LEDOUX – C’est le plus vieux des cinq. Je le conservais pour en dernier. Je pense qu’il sera très dur à manœuvrer.
LE CHEF – Quel genre?
LEDOUX – Genre fier et orgueilleux, la tête droite, le corps élancé. L’arrogance dans les yeux. C’est leur chef, apparemment. C’est lui qui devait leur donner les ordres. » (p. 82-83)
« LE CHEF – Tu as l’air bien disposé, toi. Dis-nous ton nom.
PASSE-PARTOUT – Passe-Partout.
ROGER – Les serrures, maintenant! Vous êtes pas capables de vous appeler comme du monde?
[…]
LE CHEF – Tu travailles?
PASSE-PARTOUT- Non. Je vendais des cigarettes pour gagner ma vie et apporter un peu d’argent à la maison.
LE CHEF – Et ton père?
PASSE-PARTOUT – Il boit sa paye. C’est moi qui nourris la mère. » (p. 93)
« LE CHEF – Il nous reste encore une ou deux questions à te poser.
LEDOUX – Le nom de l’Américain qui vous vendait les cigarettes?
TARZAN – Stone. Monsieur Stone.
ROGER – Son adresse?
TARZAN – Je la connais pas. Il me l’a jamais donnée. On prenait des rendez-vous et il me vendait des cigarettes. J’ai même jamais su son premier nom. » (p. 105)
- Intrigue centrée autour de thèmes universels adaptés au lectorat visé et qui intéresseront autant les filles que les garçons (p. ex., la quête identitaire à l’adolescence, le besoin d’identification à un groupe, la violence familiale, le désir de se sortir de la pauvreté).
« CIBOULETTE – C’est défendu par le chef, c’est dans les règlements de la bande.
PASSE-PARTOUT – Tu me fais rire parce que tu parles comme si t’étais pas une voleuse toi aussi.
CIBOULETTE – Je ne suis pas une voleuse. Faire la contrebande des cigarettes, c’est pas voler.
PASSE-PARTOUT – C’est voler la société, c’est voler le gouvernement.
CIBOULETTE – On les vole pas, on les trompe. C’est pas pareil. » (p. 21-22)
« TIT-NOIR – Y est venu dans notre rue et il nous a dit de le suivre. On l’avait jamais vu mais y avait l’air sûr et sincère, on l’a suivi. Il nous a dit qu’on deviendrait quelqu’un un jour si on voulait l’écouter. On l’a écouté et aujourd’hui on se fait de l’argent. On devient plus fort. » (p. 29)
« TARZAN – Vous pouvez me frapper si le cœur vous en dit, ça changera rien. J’en ai reçu des coups dans ma vie; à l’école, chez mon oncle, dans les rues; je les ai encaissés et je les ai remis. Je me suis endurci et je peux en recevoir encore plus, ça me fera pas parler. » (p. 90)
« ROGER – Tarzan est un assassin, chef!
LE CHEF – Tellement peu, tellement peu, Roger. C’est surtout un pauvre être qu’on a voulu étouffer un jour et qui s’est révolté… Il a voulu sortir d’une certaine zone de la société où le bonheur humain est presque impossible. » (p. 116)
« TARZAN – […] Moi je suis seulement qu’un orphelin du quartier qui voudrait bien qu’on le laisse tranquille un jour dans sa vie, qui en a par-dessus la tête de lutter et de courir et qui aimerait se reposer un peu et être heureux. (Il la prend dans ses bras.) Regarde-moi… vois-tu que je suis un peu lâche? » (p. 145-146)
- Didascalies et indications scéniques qui précisent les décors, les émotions et les liens entre les personnages.
« Au poste de police. La salle est sombre et ne présente aucun signe extérieur d’accueil et de bienveillance. Le chef : petit homme au front chauve est assis derrière son bureau. En face de lui, il y a un tabouret où viendront s’asseoir tour à tour les jeunes contrebandiers pour subir leur interrogatoire, tout à l’heure. Au fond, une patère et une chaise. » (p. 57)
« CIBOULETTE, qui se lève le regard perdu et crie – Non… je parlerai pas… je parlerai pas… (Elle se sent défaillir.) Tarzan! Tarzan! Viens me sauver. (Elle s’affaisse. Roger se penche et la ramasse. Sa tête est inerte et tombe en arrière.) » (p. 82)
« Ils échangent une poignée de main et Roger se retire. Le chef montre des signes évidents de fatigue. Il va s’asseoir à son bureau et médite durant quelques secondes la tête dans ses mains. » (p. 117)