- Roman psychologique prenant l’allure d’une confession intime de Jean Lefrançois, personnage principal et narrateur participant, sur sa jeunesse et son adolescence à Québec.
« J’ai grandi en croyant que c’était vrai. Pas du tout expert en la chose, à neuf ou dix ans, et en pleine période de guerre, je comprenais que la cause avait l’air d’être entendue et que c’était bien comme ça. » (p. 16)
« Je sais que je suis d’un tempérament réservé et que je n’ai pas la confidence facile; les quelques amis plus proches que j’ai me connaissent assez bien, mais jamais, je crois, je ne les ai laissés entrer dans mon intimité. Il n’était donc pas question pour moi de leur faire part du changement que je ressentais. » (p. 134)
« Je marchais sur mon orgueil, moi, le grand gaillard tout fier de ses six pieds, qui voulais me croire devenu homme. […] Quand même, Esther Garneau restait belle femme. Elle continuait de m’attirer follement. » (p. 198-199)
- Péripéties découlant de la relation établie entre Jean et les personnages secondaires de son entourage familial et social : son père, sa mère, ses frères et sœurs, sa grand-mère, l’amie de cœur, l’amante, les amis de classe et les enseignants.
« Est-il besoin de le dire : mon père était un homme tout à fait comme il faut. Il était notaire et tenait bien sa place dans la société locale. Il était notaire, et selon la tradition, il aurait été normal que je le devienne à mon tour.[…] voulais-je vraiment faire comme papa? » (p. 71)
« C’était notre secret à nous deux, Ann et moi. Sans jamais nous être concertés, il allait de soi que personne ne devait nous accompagner quand il nous prenait la fantaisie de voguer vers l’île. » (p. 111)
« Je ne sais trop pourquoi, cependant, cette rentrée différait des autres; le regard que je posais sur mes meilleurs copains n’était plus tout à fait le même, j’éprouvais comme une distance par rapport à eux et ne pouvais me défendre d’un certain jugement critique face à leurs habitudes et aux intérêts très limités qu’ils manifestaient. » (p. 133)
« Est-ce que c’est ça, le bonheur, l’abbé? Est-ce qu’on est condamné à ne jamais avoir la paix, à ne jamais trop savoir sur quel pied danser, même quand on a l’impression de vivre sur un nuage? […]
Les yeux de Maxime Fréchette se plantèrent dans les miens.
"Serais-tu amoureux, Jean?" » (p. 219)
- Nombreux thèmes, dont certains plus délicats, traitant de la société de l’époque et présentés en contexte (p. ex., femme soumise, foi et morale, autorité, société hypocrite).
« D’une génération à l’autre, je l’ai compris progressivement, les femmes de la famille – et sans doute celles d’à côté aussi! – devaient éviter absolument de se singulariser : elles rejoignaient la cohorte de leurs mères et de leurs aïeules, elles entraient dans le rang. » (p. 76)
« La foi et la morale avaient été définies une fois pour toutes par une Église qui avait établi ce qu’il fallait croire et si bien prévu ce qu’il fallait faire ou ne pas faire qu’on n’avait plus à penser par soi-même; on n’avait même plus à recourir à sa conscience. » (p. 77)
« Oser mettre en cause l’autorité, se permettre de n’être pas d’accord avec les décisions prises par les autorités qui, elles, savaient ce qui était bien pour nous, c’était faire preuve de mauvais esprit. L’élève qui prenait trop l’habitude de poser des questions, qui ne tenait pas les choses comme allant de soi, portait en lui la graine de la sédition. » (p. 82)
« Pour les gens bien, il n’y a jamais de fautes; ce sont les autres qui écopent. Je me refusais à admettre cette manière de penser et d’agir, qui était pour moi le comble de l’hypocrisie. » (p. 330)
- Séquences narratives s’entremêlant aux séquences descriptives et permettant au lectorat de s’imaginer les personnages, les habitudes de vie ou les lieux évoqués.
« Ma grand-mère Lefrançois vivait avec nous, ai-je déjà mentionné. En décembre 1939, plus d’un an après la mort de mon grand-père, elle était venue habiter dans notre maison; elle allait y prendre beaucoup de place. » (p. 41)
« Mon père était un homme d’ordre, dont la vie m’avait l’air totalement réglée d’avance. Un homme rangé, dont l’emploi du temps ne souffrait aucun écart, n’admettait pas la moindre entorse à un régime aussi prévisible que le tic-tac de l’horloge grand-père qui trônait au salon. » (p. 72)