- Un jeune personnage féminin principal d’origine juive, Olga Silberschmitt, tenant à son identité et à sa survie dans son périple de l’Allemagne jusqu’au Canada entre 1937 et 1944; un personnage secondaire allemand, Kristian van Bohlen, dont le père est nazi et avec qui Olga correspond pendant ses années de fuite.
« Kristian commençait à me surprendre : il semblait si différent de tous les garçons que je connaissais. Et pourtant, au collège, il avait l'air si sage, avec ses cheveux blonds coupés court, ses culottes repassées et ses vestes chics. » (p. 13)
« À ce moment, j'ai compris qu'en perdant mon nom, je gagnais peut-être la liberté, mais je perdais tout ce que j'aimais : ma langue, ma communauté, les couronnes de fleurs que maman me faisait en été; bref, tout ce qui avait fait mon bonheur quand j'étais enfant. » (p. 30)
« En mettant le pied dans ce pays libre, qui a la chance de ne pas avoir connu le nazisme, j'ai juré que plus jamais je ne changerai de nom. Je suis et resterai Olga Silberschmitt, et plus personne, ni le maire, ni le rabbin, ni le curé, ne m'obligera à prononcer un autre nom. » (p. 56)
- Narratrice participante, Olga, présentant l'ensemble de ses pensées, de ses doutes, de ses peurs et de ses espoirs dans sa fuite des nazis.
« J'appris que le commerce de papa était menacé, que plus personne n'osait acheter ses costumes parce que nous étions juifs. » (p. 6)
« J'avançai vers les guichets avec la terreur au ventre. Derrière la petite fenêtre, la caissière semblait lire dans mes pensées. J'avais peur qu'elle se mette à crier : "Jude? Sind Sie Jude? Ich glaube Sie sind eine Jude!"2 Je déposai mes sous sur le comptoir. Ma main tremblait et je la retirai pour qu'elle ne le remarque pas.
2 Êtes-vous juive? Je pense que vous êtes une Juive. » (p. 27)
« Je perçus alors un changement en moi. Un mélange de colère, de révolte, et surtout une énorme envie de vivre. Non, les nazis ne m'anéantiraient pas! Oui, un jour je pourrai regarder en paix un champ comme celui-ci, entourée des gens que j'aime! Je me jurai de tout faire pour atteindre l'Angleterre ou un autre pays libre. » (p. 42)
- Thèmes parfois délicats de la guerre, de l’antisémitisme, de la fuite, de l’identité et de l'amitié s'inscrivant dans des contextes sociohistorique et socioculturel réels (p. ex., Deuxième Guerre mondiale, pouvoir de Hitler, arrestation des Juifs).
« – Tu n'as rien à faire ici, sale Juif! criaient-ils, retourne dans ton quartier et n'en sors plus! Compris? » (p. 8)
« J'arrivai devant les douaniers sans vraiment avoir réfléchi à ce que j'allais dire. L'officier jeta un regard distrait sur mes papiers et me fit signe de passer. Je fis mes premiers pas en France avec l'impression de voler… » (p. 31)
« De temps en temps, j'allais rendre visite à ma tante Sarah qui habitait à deux heures de Paris. Elle me confirmait que la situation en Allemagne était de plus en plus alarmante. Hitler avait fait expulser tous les enfants juifs des écoles allemandes. Les impôts, les menaces et les violences physiques envers notre peuple se multipliaient. » (p. 34)
« Quand je repense à ce qui a suivi, ma mémoire se perd. Je mélange les jours. Ma fuite est un fragment de souvenirs confus. » (p. 40)
« Encore changer de nom? Pourquoi pas? Je n’en étais plus à un près. Cette fois, un élan m’entraînait à jouer le tout pour le tout. Tout en marchant, j’apprenais son nom, sa date de naissance : Annette Sibbler, née à Francfort. J’étais épuisée, à bout, je riais nerveusement : j’avais l’impression de me perdre à travers ces différentes personnalités, Olga, Éva, Annette… » (p. 42)
- Récit dont la forme rejoint celle du journal intime et qui constitue les souvenirs d’Olga dans un long retour en arrière des six dernières années de sa vie (1937-1944).
« Marienburg, octobre 1937
Cela faisait un mois que je fréquentais cette nouvelle école et je ne m’y sentais pas vraiment à l’aise. Comme les autres jeunes Juifs, je devais porter une blouse grise marquée d’un gros "J". » (p. 10)
« Paris, mai 1939
Cela faisait six mois que j’étais à Paris. Les amis de mes parents m’avaient trouvé une petite chambre à louer. » (p. 32)
« Hier, j’ai fini le récit que j’avais commencé il y a deux ans, pour essayer de mettre de l’ordre dans ma mémoire. Je ne vais pas te [Kristian] raconter tout ce qui s’est passé depuis que nous nous sommes vus pour la dernière fois sur ce quai de gare, il y a presque six ans maintenant. » (p. 55)