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Anatomie de la fiche Anatomie interactive
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2Les aigles ne tuent pas les mouches

Avant ce matin-là, Zoé allait son chemin tranquille.
"Tu as reçu quoi pour tes quatorze ans?
J’ai appris que j’étais laide."
Elle le sait grâce à Walter, beau au point d’être son premier amour impossible. Alors Zoé tente la méchanceté, sans grand succès, avant de créer au collège un club de moches. Mais qui a envie d’appartenir à un club de moches? Et pourtant elle trouve des volontaires!

(Tiré de la quatrième de couverture du livre.)

3 À propos du livre

Contenu

  • Personnages principaux, Zoé, une adolescente préoccupée par son apparence physique, qui vit une situation familiale difficile, et ses parents, un père alcoolique et une mère instable psychologiquement; plusieurs personnages secondaires dont les sœurs Marine et Angélique, le frère Johan, l’amie Charlotte, les membres du club des moches, Alizée, Coralie et Sarah, Monsieur et Madame Simon, de gentils apiculteurs, et Sven, l’amoureux de Zoé.

    « Quoi d’autre? Elle grossira. Oui, elle va se faire grossir! Elle sera mal aimée, de toute façon, alors il ne faudra pas qu’elle s’obstine à tenter d’allumer des regards de velours aux yeux des garçons. Les dégoûter avant qu’ils crachent sur ses souliers, c’est le mieux à faire. Pour cela devenir méchante, laide et méchante. Elle commencera demain. » (p. 10-11)

    « Johan, c’est son frère. Mais pas un frère de film, non, un vrai frère qui boit, qui rote, qui dort et joue sur son PC. Il dort dans sa chambre surchauffée, ce qui lui donne soif, alors il boit, ce qui est normal, après ça il dort, et cetera. D’ailleurs, elle ne dit jamais "mon frère", elle lui trouve des noms qui riment : le protozoaire, le ver solitaire. » (p. 11)

    « En bas, c’est le désordre des grands soirs. Le père mange devant la télé avec Marine, qui apprend directement à hurler, sans passer par la case "parler". Elle a trois ans un quart, elle pleure, elle glousse, elle glapit, mais surtout elle hurle.
    Le père cède toujours à ses caprices, et l’emmène manger avec lui, devant la télé, une bière tiède au poing. Là, Marine se calme et rit. C’est alors la mère qui s’isole dans la cuisine avec ses cris à elle, mais ce sont des cris du désert, à trop petite voix cassée par le tabac. […]
    Dans ce bal de fous, leur sœur Angélique est une étrangère. Belle, elle parle bas. Parfois même elle sourit. Et c’est inutile de l’appeler, elle a horreur des cris, alors elle anticipe, descend sur les orteils, mange en silence, aide à débarrasser et à faire la vaisselle, sauf le vendredi, jour de sortie. » (p. 11-12)

    « Le club des mouches n’est rien devenu. Quatuor fatigué, sans idées, sans imagination. Parfois, Ilario vient la trouver, il dit : "On fait quoi?" Zoé hausse les épaules. Alizé étudie. Son cerveau est une petite usine où on n’entre pas facilement. "On verra plus tard." Coralie s’absente et ne donne pas de nouvelles. Elle a juste envoyé une autre photo de tête affreuse, blanche, avec des yeux grands comme des étangs gelés, et le crâne sans cheveux, veiné de mauve. » (p. 45)
     

  • Œuvre pouvant permettre au lectorat visé une réflexion sur des thèmes délicats qui méritent d’être expliqués et placés en contexte (p. ex., mal de vivre, menace de suicide, alcoolisme, cancer, instabilité psychologique, recherche de la beauté et de l’amour, violence familiale et conjugale, séparation).
  • Texte séparé en 31 courts chapitres non numérotés et non titrés, identifiés par un saut de page; biographie de l’auteur au début de l’œuvre.

    « "Le monde, quel cirque!"
    C’est une phrase de son père : la phrase de quand il regarde le journal télévisé où passent des morts, enfants aux jambes ouvertes, à demi broyés par des éclats d’obus. Elle n’a jamais trouvé cette parole intelligente, mais lui la trouve subtile, pour la répéter comme il fait. Il a d’autres phrases comme celle-là. "La vie, la mort, on ne sait rien…" Il se gratte les cheveux. "On se demande quand même qui tire les ficelles." » (p. 50)

    « Sur la table du salon, Zoé a trouvé un mot de son père. On t’a gardé un morceau de chaque pizza sur une assiette au micro-ondes. Bon app. » (p. 88)

    « Ainsi la Terre tourne.
    Tu sais, a écrit Alizé, il n’est pas très costaud, Sven.
    C’est clair.
    Et puis, il est trop bête pour faire des lois, alors il fait la sienne, et il tire les filles par les cheveux.
    Ça prend du temps, la science, les mystères grouillent dans une armoire de la tête. Ceux qui veulent faire le tri ne sont pas sortis de l’auberge.
    Alizé, qu’est-ce que je vais devenir?
    Dors, tête de blatte, sinon tu vas devenir encore plus laide à cause des cernes. » (p. 130)

Langue

  • Registre de langue courant dans l’ensemble de l’œuvre; vocabulaire et expressions en français européen (p. ex., la laide se targue, pauvre tarée, c’est marrant, pimbêche, môme, potes); emploi de mots nouveaux (p. ex., cancre, abysses, déconvenue, mygale, jouxte) que le contexte permet de définir.

    « Molle et pâteuse, elle est rentrée chez elle, dans sa chambre noire et rose, où elle n’a presque pas pleuré. Rien ne lui semblait clair. Pas de projecteurs sous le chapiteau de son crâne, juste une piste en sable du désert, et elle au milieu qui jongle avec des idées noires, des chauves-souris. Elle était à moitié triste, à moitié fâchée, et tout ce qu’elle a été capable d’écrire dans son cahier de notes, c’est la question suivante : Pourquoi, quand on est à moitié triste, on ne pleure pas que d’un œil? Elle pourrait cacher la moitié du visage qu’elle voudrait, et sourire à demi, du côté qui ne pleure pas. » (p. 80)

    « Elle est restée là à loucher, le nez sur la glace, en essayant de réfléchir à la nuit passée, à Sven.
    Il faudra dire à Alizé que le club des mouches ne comptera jamais que des célibataires, mais que les mouches peuvent avoir leur bourdon. Il faudra leur dire que les bourdons sont plus gentils avec les tailles de guêpe, et que les grosses mouches finissent toujours par pleurer le front sur leur miroir avec les yeux ravagés et noircis.
    Sous la douche, elle s’est prise dans ses bras, tête levée pour qu’il pleuve très chaud sur ses yeux. » (p. 107)
     

  • Texte contenant une variété de types et de formes de phrases, certaines étant longues et complexes.

    « Elle a peur.
    Jusqu’ici, non, elle considérait comme une mauvaise grippe le mal rongeant Coralie. Pourquoi ressent-elle ce matin une vraie panique à l’idée que cette amie à peine entrevue puisse mourir? Peut-être parce qu’on se plaît à croire le plus longtemps possible qu’il y a un âge pour ça. Parce qu’avant d’écrire    "guéris vite", elle avait tapé "ne meurs pas". Delete. Guéris. Vite. Pensé "On t’aime fort". Maintenant, elle attend des nouvelles en se persuadant que ça ira bien, qu’elle redeviendra jolie.
    Mais ça ne doit plus compter, pour elle, de redevenir jolie. Alors pourquoi cette maladie ne s’en prend pas plutôt à elle, Alizé, ou une autre moche? Si elles meurent, c’est moins grave, si elles survivent, elles peuvent réussir à oublier un peu leur laideur, à se dire que ce n’est pas le plus important. » (p. 82)

    « En replongeant sa main au fond de sa poche, Zoé a touché la main coupée de la Barbie, et l’a serrée fort dans son poing. Une toute petite main de plastique. Elle ressent de plus en plus de peine pour elle. On ne torture pas ses jouets d’enfance, c’était sa poupée, pas le reflet d’une petite blonde ridicule et provocante. Trop tard, et tant pis. Quatorze ans, c’est peut-être l’âge des jouets cassés pour tout le monde, le moment de ranger les premiers débris, de faire le point sur sa petite vie, une première fois. » (p. 142)
     

  • Nombreuses figures de style (p. ex., comparaisons, métaphores, énumérations) qui favorisent la création d’images mentales.

    « Les insultes égratignent quand ce sont les autres qui les formulent. Quand ce sont des autres qu’on aime, les insultes coupent le cœur en rondelles, ou résonnent comme des coups de fusil. » (p. 16)

    « Elle en a oublié le club, mais Alizé continue de tourner le dos à Zoé chaque fois qu’elle essaie d’évoquer Sven. Elle se contente donc d’écrire son prénom, et de l’attendre, d’autant que l’ennui s’invite partout. Les classes donnent des heures aussi indigestes que les hamburgers-frites-mayonnaise, vu que les classes sont les fast-foods du cerveau. Chapitre vite emballé, mâchouillé, dont on ne se souvient le lendemain qu’au hasard d’un petit mal de tête. » (p. 89)

    « Quand elle s’est redressée dans sa robe à laides grosses fleurs pleine de taches, Zoé a eu pitié d’elle. L’âge blesse les femmes plus que les hommes, l’âge fait des taches de vin et taille des ornières, griffe le visage et les mains, chiffonne tout, les joues, les paupières, arrache les cheveux, qui sont en gris et blanc. Et pourtant, elle gardait ce ruban, même au jardin, comme un morceau de ciel sur la tête. » (p. 117)
     

  • Séquences descriptives très nombreuses qui apportent des précisions sur les événements, les personnages et les lieux. 

    « Soudain, une note bourrée de rage et de guitares basses remplit l’air autour d’elles, alors Zoé sort le masque rose de son cartable, et voit s’étendre Coralie, trois autres filles près d’elle, puis d’autres encore.
    Couchée à son tour, elle tourne lentement la tête, aperçoit Alizé, la tête couverte d’une taie d’oreiller peinte.
    Elles doivent être vingt ou trente à s’être allongées aux abords des grilles, le visage couvert. Déjà, les cris montent autour d’elles, certains applaudissent, sortent leur portable pour prendre des photos, et des voix fortes commentent. "C’est quoi, ce truc? Trop fort, mec!" […]
    Elles ont réussi. Flash moche, tombées comme des mouches, oui, quarante au moins, bon, peut-être vingt-cinq, et alors, c’est bien quand même! Zoé savoure. En cet instant précis où la foule des autres applaudit la performance, elle s’offre un prix Nobel, ni plus ni moins. » (p. 154-155)
     

  • Séquences dialoguées qui permettent de préciser les relations entre les personnages.

    « Jalouse, Alizé l’a suppliée d’être méfiante.
    – Il ne m’inspire pas confiance, elle a dit.
    – Ben moi, il ne m’inspire pas méfiance.
    – Tu fais ce que tu veux. Pour le club, j’ai réfléchi. Il faudrait un objectif.
    – Quel objectif?
    – Je ne sais pas. Le manifeste, je crois que ce serait bien.
    – Avec nos photos?
    – Non. Enfin peut-être aussi. Nos petites histoires. Ou un film. Quelque chose de fort.
    – Un suicide collectif.
    – …
    – Non, je rigole. » (p. 68)

    « – Je ne suis pas content qu’elle pleure, a répété son père, mais les femmes, elles pleurent toujours quand c’est trop tard. Retiens ça, retiens la leçon.
    – Elle a fait quelque chose de mal?
    – J’ai tout essayé, Zoé, voilà, c’est la vie.
    – Oui, enfin, peut-être on a plusieurs vies. Tu crois en la réincarnation, toi?
    – Non. Tu te vois devenir une poule, ou un ministre, ou je ne sais quoi?
    – Funambule, ça j’aimerais bien, c’est mon nouveau rêve.
    – Pour ça, tu n’as pas besoin de te réincarner, tu n’as qu’à suivre un cours. Moi, je me contenterai d’un seul passage en ce monde, tu sais, parce que ce monde, hein…
    – Quel cirque!
    – Exactement, ma fille! » (p. 133)

Pistes d'exploitation

  • À un cercle de lecture, animer une discussion afin de savoir ce que pensent les élèves au sujet de la décision de Zoé d’opter pour la méchanceté pour régler son mal de vivre. Demander aux élèves de faire part de leur point de vue face à son regard négatif sur la vie en appuyant leur réponse par des exemples tirés du roman ou de leur vécu. Les inviter à suggérer des façons de faire que Zoé aurait pu adopter dans certaines circonstances.
  • Relire avec les élèves l’énoncé suivant : « Quatorze ans, c’est peut-être l’âge des jouets cassés pour tout le monde, le moment de ranger les premiers débris, de faire le point sur sa petite vie, une première fois. » (p. 142) Demander aux élèves d’expliquer le sens de cet énoncé et de faire un lien avec leur vécu. Former des équipes de deux et proposer aux élèves de rédiger en quelques mots leur perception de l’adolescence. Permettre aux élèves de faire part de leur réflexion au groupe-classe.
  • Demander aux élèves de se grouper en équipes et d’expliquer, dans leurs propres mots, le titre du roman, Les aigles ne tuent pas les mouches. Par la suite, inviter les élèves à rédiger une lettre d’amitié à Zoé afin de lui faire part de leurs opinions et sentiments au sujet de la beauté physique dans le but de l’encourager à voir la vie d’une façon plus positive.

Conseils d'utilisation

  • Avant la lecture du texte, présenter les thèmes délicats abordés dans le roman (p. ex., mal de vivre, intimidation, alcoolisme, cancer, instabilité psychologique, violence conjugale, manque d’estime de soi, séparation) et assurer un appui tout au long de la lecture étant donné le côté sombre de l’œuvre.
  • Discuter avec les élèves de l’importance d’identifier des ressources dans leur milieu scolaire et communautaire auprès desquelles il est possible d’obtenir de l’appui pour des questions reliées à l’estime de soi, à la santé mentale ou à diverses maladies pouvant affecter la vie au quotidien.