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Anatomie de la fiche Anatomie interactive
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2Le Fils de Bouctouche

Fait historique : en 1917, un jeune soldat acadien a été fusillé par l’armée canadienne pour désertion, en France. L’armée a ordonné que quelqu’un se rende chez la famille du soldat, pour leur apprendre en personne cette terrible nouvelle. Cela fut fait.

Mais qui y est allé? Les documents historiques ne le précisent pas. Voilà qui sert de prétexte à ce roman historique qui s’intéresse à l’Acadie française dans le contexte d’une guerre lointaine dont on ne voyait pas la fin, et alors que s’approchait la conscription.

(Tiré du site de l’éditeur.)

3 À propos du livre

Contenu

  • Roman historique fictif aux nombreux événements véridiques contribuant à nourrir la trame du récit.

    « Au début de décembre 1917, par un matin ensoleillé vers neuf heures, j’étais assis à mon bureau, dans la citadelle de Halifax […]. La ville et le port grouillaient d’activités ce matin-là lorsqu’un vieux vapeur bourré de munitions à destination d’Europe, […] entra en collision avec un autre navire et prit feu, puis explosa quelques minutes plus tard dans l’étroit chenal devant les quais, où une foule de curieux s’étaient attroupés, attirés par le drame du navire qui brûlait. » (p. 109-110)

    « De maillon en maillon, le matériel de guerre transitait, des soutes de navires aux quais des ports, des gares aux wagons à marchandises, des postes de relais aux camions à moteurs et aux charrettes, jusqu’aux échines des mulets et aux épaules des soldats d’infanterie, se rapprochant toujours de la zone des combats où tout serait immolé avec de la chair humaine dans le creuset des batailles et des bombardements. » (p. 115)
     

  • Œuvre ayant comme arrière-plan la Première Guerre mondiale et présentant divers thèmes et sujets y étant reliés, comme la violence, le deuil, l’amitié, l’amour, la conscription.

    « Avant trop longtemps, à part les historiens, seuls ceux de ma génération se souviendront du maréchal et de ce qu’il a représenté en 1918 pour nos communautés exaspérées d’une guerre lointaine, dont on avait promis qu’elle finirait trois ans plus tôt et qui n’en finissait plus de finir, au gré des listes de tués et de disparus. » (p. 9)

    « Au combat, les soldats frappés ne tombaient pas comme cela, tout simplement, à terre, comme dans les gravures des journaux. Ils étaient décapités, démembrés, déchiquetés ou hachés en morceaux par les mitrailleuses et les éclats d’artillerie. […] Nous étions conscients de tout cela, et l’important pour mes hommes, et pour moi aussi, c’était de rentrer chacun chez soi lorsque toute cette sale folie serait enfin terminée. » (p. 121)

    « La cause annoncée du décès de Madeleine, inscrite par les médecins dans leurs documents officiels, fut le cancer qui l’atteignit en l’automne 1944, quelques mois seulement après la mort de notre Étienne. Mais je sais que c’est le chagrin qui l’a tuée […]. En temps de guerre, il n’y a pas que les obus et la mitraille qui blessent et tuent, et bien des victimes sont atteintes loin des champs de batailles, emportées comme Madeleine et sa mère par d’autres blessures. » (p. 192)
     

  • Narrateur participant, Elphège Cormier, racontant des souvenirs de jeunesse, très souvent sous forme de longs monologues intérieurs.

    « Il y a longtemps que je me suis attardé ici pour la première fois, mais je me souviens bien de l’année et de l’occasion. C’était sur un autre pont, en madriers de bois celui-là, celui d’avant la Première Guerre. » (p. 11)

    « Je connaissais bien le passage entre Halifax et Moncton, l’ayant parcouru à plusieurs reprises depuis mon affectation à l’État-major du district militaire six mois plus tôt, au printemps 1917. » (p. 38)

    « Craignant d’être appelé pour le service obligatoire et envoyé directement en Europe, il avait choisi de devancer la conscription et de se porter volontaire en demandant d’être affecté à un quelconque poste d’état-major à Moncton, ou au pire à Halifax. » (p. 119)
     

  • Personnages secondaires nombreux, décrits simplement, tous liés à la vie professionnelle, sociale ou intime du personnage principal.

    « C’était le même personnage que j’avais vu [Elphège] la dernière fois à Halifax, six mois plus tôt, au départ du bataillon : même visage bien rasé, même verres de professeur, même uniforme impeccable, même allure de frère religieux. Il semblait préoccupé toutefois, presque gêné de me voir.
    – Je vais bien, mon colonel. » (p. 57-58)

    « Le curé était un homme d’une quarantaine d’années, au visage robuste, bien rasé, grisonnant aux tempes; un homme de taille moyenne aussi, un peu bedonnant dans sa soutane noire. » (p. 78)

    « La porte de la maison s’ouvrit au même instant et une jeune femme sortit sur le perron. Le souvenir de ce moment est gravé dans ma mémoire. La jeune femme avait les traits délicats de son âge et la peau encore bronzée de l’été. Sa chevelure brune frisée lui atteignait le bas de dos. » (p. 90)
     

  • Descriptions imagées abondantes permettant de situer l’action dans l’espace et le temps et de bien ancrer le vécu des personnages.

    « La paroisse était une des plus vieilles et donc parmi les mieux établies de la région, et cela paraissait. L’église était bardochée de cèdre elle aussi, la nef haute et carrée avec des clochetons aux quatre coins. Le clocher qui dominait la façade était sans doute le plus élevé de la côte, et le plus orné de boiseries, avec un pignon allongé en pointe, surmonté d’une croix et de clochetons enjolivés, qui devait servir d’amer pour les marins arrivant du large. » (p. 76)

    « Le matin suivant se révéla sombre. Le ciel était couvert de nuées basses, grises et opaques. Il pleuvait "des clous", comme on disait encore, les trombes d’eau fouettées par les bourrasques de vent, soulevant en éclaboussures les abondantes mares d’eau qui se répandaient sans cesse sur la terre boueuse, chaque goutte lourde de cette froideur qui pénètre jusqu’à la moelle des os et marque la fin de l’été des Indiens. » (p. 107)

    « Ensemble, nous eûmes plus de vingt ans d’heureuse vie de couple, malgré le déchirement ressenti lorsque la Grande Dépression détermina notre déménagement aux États-Unis, et jusqu’à la mort de notre fils, pour laquelle j’ai le sentiment que Madeleine ne me pardonna jamais. » (p. 191)

Langue

  • Procédés narratifs variés contribuant à la composition de la trame du récit, par exemple les projections vers l’avenir, les retours en arrière et les écarts entre la durée réelle et la durée narrative.

    « La conscription viendrait brasser les choses quelques années plus tard, mais on n’en était pas encore arrivés là. » (p. 46)

    « J’étais allé à Bouctouche des années plus tôt, lorsque j’étais jeune garçon. C’était vers le tournant du siècle, à la fin de l’été et un peu avant le début des classes. » (p. 72)

    « Quelques semaines après ces événements, ma vie bascula soudainement dans une série d’aventures inattendues qui durèrent plus d’un an, et qui m’obligèrent, non pas d’oublier Madeleine, cela non!, mais de me résigner à la probabilité de ne jamais la revoir. » (p. 109)
     

  • Registre courant dans l’ensemble de l’œuvre, registre familier dans certains passages, particulièrement dans les dialogues; emploi de régionalismes et de mots anglais parfois écrits en italique et reflétant le parler typique du lieu de l’action.

    « Même l’église protestante à deux portes de chez Estelle, une bâtisse robuste et imposante en bois massif, a été hissée sur des runners et halée en plein hiver par des teams de chevaux » (p. 12)

    « – Pi ça fait l’affaire du gouvernement impérial itou… ajoutait-il. » (p. 14)

    « – C’est-y toi le capitaine Cormier? demanda-t-il, de loin. C’est l’curé qui m’a enwoyé vous qu’ri. Pour vous âm’ner au presbytère. » (p. 75)
     

  • Figures de style variées donnant de la couleur locale au récit (p. ex., métaphore, personnification, comparaison). 

    « La nature somnole en octobre. Elle "cogne des clous" […]. Bientôt, elle sommeillerait profondément, la nature. » (p. 13)

    « Quelque part là-dedans par-dessous les lamentations et les hurlements métalliques des scies, l’engin à vapeur battait comme le cœur d’une bête, son haleine grisâtre s’élevant de la cheminée en tôle, haute et mince. » (p. 18)

    « La foule se dispersa comme la fumée de la locomotive, par petits groupes à pied, discutant de la guerre ou des récoltes de foin qui étaient abondantes, ou commérant simplement. » (p. 29)

Référent(s) culturel(s)

  • Référents culturels nombreux liés au milieu social, à la langue et à des valeurs propres aux Acadiens de l’époque.

    « Je me trouvai un peu gêné devant Stanislaus Léger dans mon uniforme anglais. Je savais que c’était lui, ce tristement célèbre "Jean Suis Las", son nom de plume, celui qui avait été chassé de son emploi de rédacteur à L’Évangéline par les directeurs du journal […]. Il avait eu la fâcheuse et malhabile idée de déclarer en première page du journal, et au nom du journal, ses opinions tranchantes contre la participation acadienne à la "guerre de l’Empire", des opinions qui allaient à l’encontre de tout ce qui avait pu être dit publiquement jusqu’alors au sujet de la guerre. » (p. 63)

    « Le couvent était une œuvre récente des sœurs, qui avaient essaimé de la maison mère à Saint-Joseph. Il s’était fait connaître comme lieu d’enseignement, et de partout les familles qui en avaient les moyens envoyaient leurs filles pour y recevoir une instruction secondaire prestigieuse. Plusieurs des filles poursuivraient ensuite la formation qui en ferait des enseignantes dans les écoles françaises des paroisses… » (p. 77)

    « – Des hommes comme le sénateur Poirier et l’honorable Amand Landry ont travaillé pour bâtir un pays catholique et français ici, mais si vous vous en allez tous, vous autres, ça n’aura pas valu la peine. » (p. 102)

Pistes d'exploitation

  • Dans cette œuvre, on raconte la Première Guerre mondiale comme l’ont vécue des individus plutôt que comme un grand moment de l’histoire contemporaine (p. ex., l’expérience du colonel D., p. 31 à 35). Discuter de ce choix d’auteur.
  • L’auteur présente souvent des descriptions par l’accumulation de détails (voir l’exemple ci-après). Relever de telles descriptions de personnages, de villages, de régions rurales et d’événements. Discuter de la valeur littéraire de ce genre de description.

    « Les quelques officiers jouaient les galants, leurs uniformes bien repassés, leurs boutons, leurs bottes et leurs ceintures Sam Brown astiqués et ajustés, leurs swaggersticks sous le bras. Ils ne savaient sans doute rien de la fête de l’Assomption, mais étaient visiblement surpris et flattés par cette foule nombreuse et bien vêtue qui les attendait, les femmes sous leurs plus beaux chapeaux d’été ou en simples coiffes, les hommes en chapeaux de paille et en manches courtes. » (p. 27)
     

  • Faire une recherche au sujet de la crise de la conscription au Canada pendant la Première Guerre mondiale.

    « Inutile de songer à m’enrôler, aussi, parce que l’armée ne s’était jamais donné la peine d’être accueillante envers les catholiques ou les Français de chez nous. Mais personne ne pouvait savoir ce qui allait arriver. Trois ans plus tard, ils ont inventé la conscription pour enrôler nos jeunes hommes de force, et la Dominion Police armée est venue les chercher jusque dans les villages reculés des hautes terres. » (p. 16)

Conseils d'utilisation

  • Avec les élèves, situer le cadre historique et géographique de l’œuvre avant d’en faire la lecture.
  • Traiter des conflits et de l’intolérance, voire de la haine entre les Canadiens français et les Canadiens anglais à l’époque, et reconnaître la façon dont l’auteur a pu en intégrer plusieurs exemples dans son texte sans pour autant y donner son approbation.
  • Discuter en groupe-classe de la note de l’éditeur (p. 6) au sujet de la relation fiction-réalité.
  • Tenir compte du fait que l’auteur décrit de façon réaliste et saisissante des scènes dans lesquelles des soldats sont blessés lors de la guerre. Accompagner les élèves dans la lecture de ces extraits.