- Conte moderne dont le personnage principal est Babine, le fou du village, un homme étrange, peu gâté par la nature, souffre-douleur de ses concitoyens et sorte de symbole de la fragilité humaine.
« En fait, l’enfant souriait. Il entra dans la vie de l’avant, malgré les apparences. Le devant comme un derrière. Parce qu’il était affreux. D’où la confusion. » (p. 19)
« Babine subissait donc la volée sous prétexte de soupape et en souriant. Régulièrement, depuis son tout début. Toujours désagréable à l’œil nu, il s’offrait comme une proie facile à fesser sincèrement. À sept ans, la laideur de Babine s’amplifiait tant que sa mère ne le laissait plus sortir le dimanche à cause des vidanges. » (p. 24)
« Et quand on lui offrait une job, tel qu’il fut dit avant, il se voyait incapable de dire non. C’est ainsi qu’il écopait de toutes les besognes. » (p. 70)
- Nombreux personnages secondaires, des villageois de Saint-Élie-de-Caxton, parmi lesquels le curé neuf, le forgeron Riopel et Brodain Tousseur, le seul ami de Babine.
« Comme de fait, le curé neuf annonça la cascade prévue. » (p. 61)
« Le forgeron découvrit même avec ce nouvel appareil que la deuxième semaine du mois de novembre dure près de trente jours. Lui qui buvait une once de gin chaque soir avait dépensé près d’un quarante onces avant que le temps ne change de semaine. » (p. 75)
« Un des quelques à s’investir dans le minuscule bien-être de Babine, ce fut M’sieur Brodain Tousseur. Lui-même qui avait mis la main à la pâte au moment de son arrivée au monde. On le reconnaissait d’ailleurs comme un des plus proches amis du fou. Brodain Tousseur l’utilisait sans en abuser. Aussi, il l’invitait chez lui et l’accueillait bouche ouverte lors de ses visites. » (p. 111)
- Narrateur omniscient, Fred Pellerin, faisant le récit approximatif de contes dits autrefois par sa grand-mère et racontant le quotidien des villageois; narrateur participant, ce même auteur, commentant les événements et ajoutant ainsi sa touche personnelle afin de leur donner un caractère véridique; peu de séquences dialoguées.
« Babine était si repoussant que jamais encore, même rendu à l’âge majeur, il n’avait senti l’effet d’un regard de femme sur lui. Pour lui, l’amour et ses effets appartenaient à cette sorte de choses accessibles qu’aux autres. Et puis on en parle tant, de l’amour. Le curé en faisait un sujet de prédication dans ses sermons, les chansons ne se répondaient que sur cette note. » (p. 30)
« Comme récompense, je vous le disais et je n’ai pas l’intention de l’omettre, Babine a été condamné à mort. Cette fois-là, si je ne me trompe pas dans ce qu’on a dit à ceux qui me l’ont répété, ce fut la guillotine. Une guillotine-maison, un sciotte rouillé sur un brancard de flaube. La foule criait :
– La mort! La mort!
La lame n’était pas affilée, mais ça faisait mal quand même. On laissa tomber le couperet plusieurs fois, jusqu’à lui blesser la bosse. Une soirée magnifique. » (p. 45-46)
- Un lieu unique et bien réel, affublé de différents noms au fil des chapitres : le village de l’auteur, Saint-Élie de Caxton, en Mauricie.
« Saint-Élie de Garnotte, sortie 166 de l’autoroute 40, à droite au T puis à gauche à la troisième lumière, toujours tout droit ensuite, malgré les portions de terre battue, c’est mon village. Saint-Élie de Garnotte : quand t’es perdu, t’es rendu! When you’re lost, you’re là! » (p. 17)
« Saint-Élie de Klaxon, une bande de criards qui s’en font une légende, de la rumeur, c’est mon village. Un patelin amplifié qui s’entend entre les branches. » (p. 29)
« Saint-Élie-de-Caxton, véritable, c’est mon village. Un patelin qui existe. » (p. 111)
- Récit puisé dans l’imaginaire collectif teinté de merveilleux et composé de plusieurs anecdotes relativement vraisemblables, dont les thèmes toucheront aussi bien les garçons que les filles (p. ex., l’idiot du village, le bouc émissaire, le harcèlement).
« Le réflexe étant toujours le même (Quand ça va mal, c’est à cause du fou!), le curé organisa une délégation pour aller brasser Babine et lui demander de nous débarrasser de la bête. Sous les invectives, le fou refusa. » (p. 41)
« Les circonstances allant toujours contre lui, qui de mieux comme coupable. Toujours, tout était contre lui : la chance, les gens, la météo. Il choisissait de sortir que déjà le ciel s’obscurcissait. Et on ne se tannait pas. Plus ça allait, et plus les gens lui en voulaient. » (p. 48)
« La troupe arrivait au presbytère. Le curé vint ouvrir. Trois, quatre entrèrent en dedans, tenant Babine par le chignon du cou, par la bosse. Ils le tenaient, pour montrer leur supériorité, pour faire semblant qu’ils avaient eu à réussir alors que Babine n’avait eu qu’à échouer, simplement. » (p. 52)
- Plusieurs photos en noir et blanc du village et de ses habitants, dont une de Roger Lafrenière (mort en 2001 et source d’inspiration pour le personnage de Babine), apportant une touche de véracité aux histoires; disque compact capté en 2002 dans les Maisons de la culture de Montréal et dont le contenu, à cause de l’oralité, diffère de la version écrite, mais enrichit tout autant la lecture des contes.