- Recueil composé de 13 contes de longueurs variées avec, en exergue, une citation d’auteurs allant de Juvénal à Jean Ducharme, en passant par Galilée et Molière; fables modernes sur des sujets aussi différents que la maïeutique, les élections, la langue ou encore les charlatans de tout genre, dans lesquelles l’action progresse, entre autres, par des incursions dans le passé, des juxtapositions, des analogies et des répétitions.
« Que ferai-je à Rome?
Je ne sais pas mentir.
Juvénal » (p. 35)
« La fable serait issue du conte, dont elle ne se serait séparée que du jour où, croyant faire œuvre utile, un conteur tira de son récit une morale. Ce qui distingue les fables des promesses électorales, deux espèces d’un même genre, ce serait plutôt la souplesse de la morale. » (p. 56)
« À défaut de grandir, on peut toujours réduire le monde à sa mesure. » (p. 66)
« Le cirque jadis s’annonçait en battant le tambour. Fanfare en tête, éléphants et saltimbanques faisaient parade, et les badauds les suivaient. Si c’était jour de fête ou de foire, personne ne manquait à l’appel. […]
Aujourd’hui, on ne va plus au cirque, c’est lui qui vient à chacun. Il suffit de s’asseoir pour qu’il s’installe à demeure, au salon ou dans la cuisine, ou les deux à la fois.
Charlatans, baladins et bateleurs, tous beaux, tous bons, tous aimables, ne sont plus ambulants ni nomades, ni charlatans. Saltimbanques et funambules, toujours d’ailleurs et toujours d’ici, sont tout ensemble cousines et curés, visiteurs et voisines, évêques et belles de nuit ou de jour et de bien d’autres replis encore. » (p. 81-83)
- Narrateur le plus souvent omniscient, parfois participant, qui dresse le portrait de personnages très humains, majoritairement masculins parmi lesquels 'Tit-Bob pratiquant la maïeutique, Jérôme Savard, l’homme le plus riche de Saint-Issaire, Germain Lacombe, un retraité de l’université, ou Maurice Robert, le pianiste devenu sportif professionnel; séquences dialoguées rares surtout présentes dans le texte intitulé Le veuvage.
« Mais quand on est l’homme le plus riche de Saint-Issaire, on ne se construit pas une maison : on se la fait construire. Et on ne se contente pas de n’importe quoi. » (p. 27)
« – Je ne vois pas pourquoi je me soumettrais à cela. En fin de compte, ce serait encore lui qui parlerait à ma place.
– Le plus simple, lui dis-je, serait, comme toujours, de ne rien faire. Vous êtes la légataire universelle, vous pouvez donc disposer des biens comme vous l’entendez. » (p. 73)
« Mes démêlés avec le calendrier remontent loin. Même avant d’avoir atteint l’adolescence, je ne voyais aucune raison de fêter en même temps que tout le monde : Noël, Pâques, le Jour de l’An, la Saint-Valentin, le Carême ou la Quasimodo me paraissaient prétextes de peu de poids. » (p. 135)
- Analyse et caricature fines, critique légère, spirituelle et très à point dirigée vers un groupe et non une personne en particulier (p. ex., les médecins, les médias, les critiques, les publicistes, l’université, les politiciens).
« Quant aux promesses électorales, c’est à la façon de Phénix qu’elles perdurent : elles meurent aussitôt après chaque élection, pour ressusciter de leurs cendres à la suivante. Seuls leurs effets sont immuables. Ainsi Éphrem Rolland et Joshua Jessop siègent-ils toujours, l’un à l’Assemblée nationale, l’autre à la Chambre des communes, chacun accusant l’autre de ne pas tenir ses promesses. Si, au lieu de promesses électorales, ils avaient fait des fables, leur sort eût été depuis longtemps celui d’Ésope à Delphes. » (p. 57-58)
« Un jour, donc, s’amène chez lui, sur la foi de sa réputation bien établie, un journaliste de haute voltige, qui plane si haut et si beau qu’il fait profession de lire les nouvelles à la télé. C’est un métier qui exige sérieux, belle voix, noble port, prestance et sincérité : en un mot comme en deux, c’est la plus haute forme de sacerdoce. » (p. 62)
« Quant à tes études, elles te seront utiles. Si tu veux pratiquer des sports, tu dois continuer de suivre des cours. Pas nécessairement autant que maintenant, mais quelques-uns quand même. C’est la condition que l’on impose à chacun. Comme on exige que chacun maintienne une certaine moyenne. Mais n’exagérons rien. Tes exploits sur le champ de football feront vite oublier tes moyennes en classe, quelles qu’elles soient. Et puis, tout athlète a droit à de l’aide dans ses travaux scolaires. D’ailleurs, qui, parmi les professeurs, oserait porter atteinte à la réputation de l’école en infligeant un échec à un joueur étoile? » (p. 100)