Green Mustang
Cette pièce très contemporaine explore, avec réalisme et humour, « la complexité des relations exogames et de l'éducation des enfants non seulement bilingues, mais aussi biculturels ».
(Tiré de la quatrième de couverture du livre.)
Cette pièce très contemporaine explore, avec réalisme et humour, « la complexité des relations exogames et de l'éducation des enfants non seulement bilingues, mais aussi biculturels ».
(Tiré de la quatrième de couverture du livre.)
« MONA – Mon cher petit papa.
ÉRIC – Non, non! Laisse faire le cher petit papa. Dans quelle humeur suis-je au juste?
MONA – Chaque fois que j’utilise deux mots d’anglais, je reçois toujours le même sermon… à propos de renier mes ancêtres. » (p. 12)
« AMANDA – Ce jonc que je porte, est-ce l’anneau qui m’empêche d’atteindre mon plein potentiel?
ÉRIC – Tu l’atteins tous les jours, ton plein potentiel.
AMANDA – Qui fait de moi la petite esclave de 18 ans du professeur Lechasseur? » (p. 23)
« AMANDA – Oui, oui! Je t’aime toujours. De tout mon cœur. Ça n’a pas changé.
ÉRIC – Alors, c’est quoi cette folle idée de partir? Et avec une valise en plus de ça!
AMANDA – Do you even know what love is! » (p. 37)
« MONA – J'ai toujours été curieuse. Pourquoi l'as-tu mariée, maman? Sachant qu'elle était juste une maudite Anglaise.
[…]
MONA – Comment penses-tu qu’elle se sentait chaque fois que tu dénigrais les Anglais? (Elle imite Éric.) "On va respecter la langue de mes ancêtres dans cette maison!" Et qu’advenait-il des ancêtres à Mom?
ÉRIC – C’est pas la même chose pour ce monde-là. Nous autres les Fransaskois on s’bat depuis plus d’un siècle. Les Ukrainiens ont fait un choix… un choix conscient d’abandonner leur langue. » (p. 72-73)
« ÉRIC – Le chef du Département veut que j'enseigne un autre cours… à des débutants…
AMANDA – Ah oui?
ÉRIC – … à des Anglais.
AMANDA – Puis?
ÉRIC, se tournant vers elle – Amanda, j'suis professeur de littérature… depuis plus de trente ans. J'ai ma permanence au Département… et on veut que j'enseigne de la grammaire… à des petits imbéciles qui savent ni lire ni écrire. » (p. 21)
« ÉRIC – […] J'ai jamais pu comprendre pourquoi tu voudrais faire une Maîtrise en "English Literature" (Prononçant avec dédain.) quand nous avons de si belles œuvres littéraires en français.
MONA, se levant, elle vient s'asseoir sur un pouf devant le fauteuil de son père – Parce que je voulais te défier, mon cher p'tit papa! Ç'a toujours été la grande motivation dans ma vie. Défier le professeur Lechasseur. » (p. 27)
« MONA – […] Quand j'étais adolescente, j'faisais des choses juste pour te faire chier! J'suis bête comme ça. Toute ma vie… toute… toute… toute mon… mon "being", c'est de rendre ta misérable vie encore plus misérable. » (p. 27-28)
« MONA – Et maman? Elle était une mauvaise habitude… comme ses cigarettes?
ÉRIC – Ta mère, elle était la plus belle femme que j’avais… Est-ce qu’on parle de la Mustang ou est-ce qu’on parle de ta mère?
MONA – Bien, maman…
ÉRIC – Écoute! Ta mère, elle a fait un choix…
MONA – Tu y as parlé depuis ce soir-là? » (p. 31)
« AMANDA – Si tu es vraiment fier de moi, laisse-moi avoir ma liberté. (Elle jette le jonc dans un des verres vides.) Reprends-le, le jonc qui nous unit, car moi aussi je veux la trouver, cette fierté.
ÉRIC – Bien… eh… bien…
AMANDA – Laisse-moi aller! » (p. 40)
« AMANDA – Avec la centralisation des écoles… les gens de Carpenter ont été envoyés à Wakaw… puis là, nous autres les Ukrainiens, on a pas mal perdu notre identité.
[…]
AMANDA – […] Plus tard, quand j’étais à l’école… après la mort de ton gido… Trudeau parlait des langues officielles. Baba voulait que j’devienne bilingue, alors on a déménagé à Saskatoon. » (p. 49)
« AMANDA – […] Est-ce que c’était la même chose il y a trente ans? Tu sais, quand j’étais étudiante dans ton cours?
ÉRIC – Heureusement qu’il y avait quelques filles brillantes… Comme toi.
AMANDA, excitée comme une adolescente – Vraiment!
ÉRIC – Les devoirs toujours bien faits. Toujours prête à participer en classe. Parfaite étudiante comme on n’en voit plus sur le campus aujourd’hui. » (p. 22)
« ÉRIC – […] Tu vois, Mona, en 1969 j’me voyais comme une réincarnation de James Dean.
[…]
ÉRIC – Peter Fonda venait de nous offrir Easy Rider. J’étais jeune. Je rêvais. » (p. 35)
« Éric est assis à son pupitre; même si le fauteuil roulant est présent, il ne l’utilise pas. Il aura pris le temps de se changer pour avoir la même tenue que dans la scène précédente avec Mona, pour indiquer que nous sommes revenus au présent. » (p. 43)
« Aux lumières, Éric est debout au fond, tourné vers la porte menant à la cuisine et aux chambres à coucher. Elle a son manteau sur son bras et sa valise dans l’autre main. » (p. 61)
« MONA – Papa! C'est quoi qui s'passe au juste? (Silence. Un temps.) Well, old man! Spill the beans. Quand tu commences à m'parler de maman, ses cheveux puis son nez, bien j'sais qu'y a quelque chose qui te tracasse.
ÉRIC – (Un temps.) Tu viens me visiter… une rareté… C'est normal que ça provoque des souvenirs.
MONA – T'es tellement plein d'merde, l'père! J'ai passé une semaine avec toi à Noël, sur les plages de Cancun, puis quatre jours à Pâques. Une rareté? Give me a break! » (p. 27)
« ÉRIC – Bien oui. Écoute, veux-tu l’entendre ou non, l’histoire?
MONA – Oh, ah oui. Définitivement. » (p. 30)
« ÉRIC – Papa allait m’acheter une voiture… neuve… comme cadeau de graduation. » (p. 34)
« MONA – […] Papa. (Elle écoute.) Oui. Papa aussi, il jouait avec nous autres… parfois… après souper… mais j’pense qu’il n’a jamais été confortable à jouer à cachette avec un toutou… » (p. 67-68)
« ÉRIC – […] "[…] mes cheveux volent dans toutes les directions, comme ceux d’Esméralda, dans les bras de son Quasimodo sur les remparts de Notre-Dame de Paris." » (p. 9-10)
« ÉRIC – Laissons faire les médecins… à moins que ce soient les médecins de Molière. (Un temps.) Non. Bien. Revenons à nos brebis. Tu disais? » (p. 13)
« ÉRIC – […] Bien sûr, mon père avait un autre rêve pour moi. L’éducation formelle n’a jamais été sa première motivation. » (p. 34)
« ÉRIC – Tu as raison, Amanda, ce Nicolas Charlier a une belle plume. » (p. 37)
« ÉRIC – … Au début, ma belle Amanda, tu étais comme ce vin… ouais tu étais une puissance moyennement corsée, avec une touche d’austérité… mais avec le temps est venue la récompense : une riche et savoureuse pointe de truffes. Comme ce vin costaud et ayant de la mâche, tu n’es pas pour n’importe qui, mais pour celui qui recherche à la fois intensité et complexité. » (p. 41)
« MONA – Très bien. Très bien. On parlera pas de maman. Mais j’vais préparer le souper.
ÉRIC, sourire aux lèvres – C’est toujours permis?
MONA – Quoi?
ÉRIC – La femme dans cuisine?
MONA – Papa!
ÉRIC – Avec la libération de la femme. » (p. 14)
« AMANDA – Que reste-t-il à se dire? Ta petite Amanda n'est plus. Je suis libre maintenant, complètement libre. Libre de poursuivre mes rêves. (Un temps. Elle s'éloigne de lui.) En passant, Éric, j'ai toujours détesté le Faculty Club. » (p. 25)
« MONA – Évidemment, nous autres les Français, on préfère faire l’amour. Ça, c’est le domaine des Français, hein l’père?
ÉRIC – L’amour? Oui.
MONA – Et si on tue, on préfère ne pas en parler, hein? Ou en faire un "best-seller".
ÉRIC – Comme tu le dis avec ta gueule d’Anglaise, les… les "best-sellers", ce sont tous de la petite merde. » (p. 28-29)
« ÉRIC – Ça fait six mois qu'elle est partie. On a passé vingt-cinq ans de nos vies ensemble… j'y pense souvent. J’arrive pas à comprendre pourquoi elle est partie.
[…]
MONA – C'est peut-être la raison pourquoi elle est partie! Pas parce que t'étais jaloux de ses succès. Mais parce que tu souffres mal les Anglais. » (p. 70-71)