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Anatomie de la fiche Anatomie interactive
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2Le cœur est un muscle involontaire

Florence n’aime pas les écrivains, ces êtres névrosés, et encore moins leurs livres, ces choses corpulentes qui ne sont même pas vraies. Florence, par contre, aime Zéno, et Zéno, lui, aime Pierre Laliberté, ce romancier mythique dont personne n’a jamais aperçu le visage. Et c’est à cause de Zéno que Florence découvre un jour que Pierre Laliberté lui a volé la phrase la plus précieuse qu’on lui ait jamais dite. La voilà donc sur une piste pouvant la mener à cet imposteur qui pille la vie des autres pour construire ses livres.

(Tiré de la quatrième de couverture du livre.)

3 À propos du livre

Contenu

  • Œuvre tenant du roman existentialiste et du roman policier, présentant, à la fois, quête et enquête (quête de soi et enquête sur un écrivain).

    « Comment se fait-il que nous soyons encore entre nous, comme il y a dix ans, comme il y a vingt-cinq ans? Où sont nos femmes, nos amants, nos enfants? Pourquoi sommes-nous demeurés si stériles? Pourquoi n’avons-nous pas de prolongements vivants, de radicelles et de rhizomes? » (p. 55-56)

    « Très bien. Partir. Partir et trouver Pierre Laliberté, dans New York gigantesque et bordélique dénicher Pierre Laliberté et le garder pour moi seulement… » (p. 112)
     

  • Un personnage principal, Florence, qui est également narratrice participante; à trop vouloir démontrer la névrose des écrivains, elle s’en trouve aussi atteinte et dévoile sans vergogne ses incalculables états d’âme.

    « – Je n’aime pas les écrivains, dit-elle. Vous non plus, vous ne les aimez pas. Les écrivains ne sont pas plus névrosés que vous. C’est simplement qu’ils exhibent leur névrose. » (p. 35)

    « Mais j’ai le cœur moche et petit, à force de n’avoir été agrandi par personne d’autre, personne d’authentiquement étranger, personne de valable. Et chacun des cadeaux que je dénude, offerts par mes étrangers trop intimes, m’enferre dans ma petitesse. » (p. 57)

    « Je suis habitée par quelque chose qui bouillonne, mais qui empêche en même temps toute chaleur. C’est le froid en moi qui bouillonne. C’est ce qu’on appelle probablement de la rage. Je suis atteinte du chaud-froid de la rage. » (p. 156)
     

  • Personnages secondaires très nombreux, dont trois retiennent davantage l’attention en raison de l’influence qu’ils exercent sur le personnage principal : Zéno, collègue de travail et ancien amant de Florence; l’écrivain Pierre Laliberté, que Florence réussit à retrouver; le défunt père de cette dernière, qui lui rappelle constamment sa quête.

    « C’est ma faute, tout cela est ma faute, cette souffrance aiguë que provoque chaque dérapage prévisible de Zéno est ma très grande faute. Je suis coupable de souffrir pour rien. Quel est cet attachement répugnant pour quelqu’un avec qui rien ne sera jamais possible? » (p. 112)

    « Comment décrire Pierre Laliberté sans l’affadir, comment parler du fracas discret de nos rencontres sans les assourdir? D’ailleurs, que suis-je capable de dire de véridique à son sujet sans tomber dans la fabulation de mon imagination tordue? » (p. 250)

    « Admettons que la filiation existe, admettons même qu’il n’existe qu’elle, admettons que je sois le prolongement de Pepa et presque rien d’autre […] Que faut-il faire avec ça? Y a-t-il quelque chose à faire? […] J’ai envie d’écrire. » (p. 399)
     

  • Aphorismes nombreux, du cru de l’auteure, mais livrés par le truchement de la narratrice.

    « – Parce que se ficher d’être belle, vieille, laide, poilue, c’est devenir formidablement libre. Donc, si on avait un peu de dignité, spontanément on choisirait la liberté. Mais on choisit la beauté plutôt que la liberté parce qu’on est idiotes, masochistes, et féminines. » (p. 195)

    « Y a-t-il quelque chose qui dure? En dessous de cet incessant va-et-vient de formes qui s’érigent pour mieux s’aplatir, peut-on compter sur un noyau inaltérable, une vérité vers laquelle on pourrait tendre nos forces, nos espoirs? » (p. 366)

Langue

  • Registre de langue habituellement courant, mais parfois familier ou populaire selon la situation ou le statut des personnages en cause.

    « Je reste un moment abasourdie à me demander où me précipiter, comment me protéger de la catastrophe qui s’est certainement abattue sur les lieux sous forme d’un incendie, d’un astéroïde, d’un tremblement de terre. Une femme m’adresse quelques mots inaudibles. » (p. 13)

    « – Vous avez pas le droit d’être dans le parc la nuit. Quessé vous faites? réitère Cheval 1.
    – On dirait qu’ils ont enterré quelque chose, dit Cheval 2.
    Cheval 2 a une voix plus douce, une voix de femelle. » (p. 46)

    « Bertrand Poche se met à glousser à son tour, et je lis clairement dans ses yeux, cette fois, que ce n’est pas lui. […]
    – Ils lisent tous les mêmes livres. […] Je vais te dire, moi : ils toffent deux jours, pis ils détalent. Penses-tu que c’est grandissant, se tenir avec des vieux finis qui intéressent plus personne… » (p. 75)
     

  • Mots, expressions et phrases complètes en anglais (p. ex., Log off, has been, fashionable, Not over my dead body, What did you expect?), évoquant la réalité linguistique du milieu des affaires; plusieurs mots inventés de toutes pièces, véritables passe-partout témoignant de la singularité de la narratrice (p. ex., agonique, égarouillé, Kodakophone, lalibertaire, Lalibertéphile).
  • Style très imagé, souvent ponctué d’associations inattendues de mots (p. ex., des oies arthritiques, une baroque hallucination collective, de la gadoue précosmique, des boudins inopérants, sa masse de faux bouddha lubrique), typique de l’état d’égarement du personnage principal.

    « Ah s’il disait mon nom, même en silence, même dans la cacophonie bafouillante de sa fièvre, ah s’il ne faisait que penser à mon nom, je l’entendrais, même esquissé dans une molécule agonisante de son cerveau, je l’entendrais. Dis mon nom, Pepa. » (p. 11-12)

    « Qu’est-ce que New York, après tout? Un bout de terrain minuscule, que des spéculateurs ont transformé en fonds mutuel, tellement petit et engorgé par la cupidité humaine qu’on a dû s’y résoudre à bâtir en hauteur pour parvenir à loger toutes ces gueules voraces. Et il faudrait s’extasier devant les gratte-ciel? » (p. 105-106)
     

  • Nombreuses figures de style variées (p. ex., personnification, hyperbole, métaphore, comparaison, énumération), souvent regroupées, alliant parfois humour et tendresse, deux éléments qui semblent, de prime abord, incompatibles avec la personnalité du personnage principal.

    « Il laisse s’installer un silence. Il me lâche les mains et les yeux. Mais je ne m’en trouve pas libérée pour autant, au contraire, je ploie sous les dix tonnes de ce qu’il vient de dire. Pendant un instant, je vois ma vie déchirée brutalement en deux, la vieille partie battant au vent comme une merveilleuse chose légère qui s’apprête à me lâcher, la nouvelle exigeante, massive, enténébrée, ouvrant sa gueule noire de précipice directement sous mes pieds. » (p. 82)

    « … dix fois il se rembrunit comme un gratte-ciel nocturne qui vient de perdre l’électricité. La dixième fois, il abat son poing sur la table, et nos deux steaks frites se jettent l’un sur l’autre en état de panique. » (p. 137)

    « Je la regarde manger. Elle a retrouvé l’énergie intégrale, celle d’avant la chute du paradis terrestre. Avale, lape, frétille, agite la queue comme un plumeau dément, court jusqu’à moi pour me faire partager un peu de sa bave enrichie, revient ventre à terre jusqu’au plat qu’elle renverse, mordille, renifle, lèche, croque, glousse, pondrait des oeufs si elle était organisée pour ce faire. […] Je l’aimais plus déprimée. » (p. 312)

Référent(s) culturel(s)

  • Citations de Réjean Ducharme, mises en exergue, au début du livre; comme Réjean Ducharme, l’écrivain Pierre Laliberté, dans Le cœur est un muscle involontaire, veut rester incognito et ne fait donc aucune apparition en public.
  • Allusions à certains quartiers et rues de Montréal (p. ex., mont Royal, rue Saint-Denis, coin Sherbrooke et McGill).

Pistes d'exploitation

  • Discuter avec les élèves de l’effet créé par la répétition des mots « dit-elle » dans le récit de l’entretien entre Florence et Gina Da Sylva aux pages 34 à 37; leur demander de remplacer ces mots par d’autres plus originaux et de commenter l’effet produit par ces substitutions.
  • Demander aux élèves de comparer les concepts de beauté et de liberté, dans notre société, en se basant sur la pensée de Florence à la page 195 : « – Parce que se ficher d’être belle, vieille, laide, poilue, c’est devenir formidablement libre. »
  • Inciter les élèves à faire une recherche sur Réjean Ducharme et son oeuvre; leur demander ensuite de montrer la ressemblance entre Pierre Laliberté, écrivain dans Le cœur est un muscle involontaire, et Réjean Ducharme.
  • Demander aux élèves de brosser un portrait détaillé de Florence.
  • Proposer aux élèves de rédiger les premières pages du roman que s’apprête à écrire Florence à la fin du livre.
  • Demander aux élèves de noter, au cours de leur lecture, les phrases qui leur semblent le plus philosophiques (p. ex., celle de la page 346 : « À quoi sert la vérité, sinon à arracher le filtre qui molletonne les choses insupportablement acérées? »); les inviter à discuter de la signification de ces phrases dans le cadre d’une table ronde.

Conseils d'utilisation

  • Présenter aux élèves les caractéristiques du roman existentialiste et du roman policier.
  • Présenter aux élèves un passage chargé de figures de style; relever ces figures et expliquer la valeur de chacune.
  • Lire, à haute voix, certaines phrases très longues du livre et expliquer aux élèves l’effet produit.
  • Proposer aux élèves la lecture d’un livre de Réjean Ducharme, notamment L’Avalée des avalés.

Ressource(s) additionnelle(s)

  • IDÉLLO.org, ressources éducatives en ligne, 7e à 12e année, Série : Mon premier emploi, Le client.
  • IDÉLLO.org, ressources éducatives en ligne, 11e année, L'amour au XXIe siècle – Guide pédagogique.