- Premier récit d’une saga historico-anthropologique des tribus amérindiennes dans le secteur de la Nouvelle-France au début du XVIIe siècle; ouvrage accompagné de multiples notes explicatives, d’une bibliographie et de cartes géographiques de l’époque.
« Comme tous les peuples, ceux de l’Amérique du Nord ont connu une constante évolution et l’Européen est débarqué parmi eux à un moment donné de celle-ci. […]
Cependant, il a pu distinguer assez tôt deux grandes familles linguistiques et culturelles : celle des chasseurs et celle des horticulteurs, qu’aujourd’hui on désigne respectivement sous le nom de famille algonquienne et famille iroquoienne. » (p. 16)
« – L’Iroquois craint les fils de l’Ours, mais il craint aussi le bâton de feu, rappelle-t-il.
Et cela change l’évolution de leurs conflits. Bien que seules les armes traditionnelles aient été utilisées pour remporter leur éclatante victoire de l’automne, ils ne doivent cependant pas perdre de vue l’existence de l’arme suprême. » (p. 199)
« 1643, Ville-Marie, chapeautée par la Société Notre-Dame de Montréal pour la conversion des sauvages de la Nouvelle-France.
Avec dignité, Tessouat, troisième du nom, s’avance vers la Robe-Noire pour recevoir le baptême. Ce qui reste de son peuple l’y oblige. Il se doit de lui garantir un refuge en cette île giboyeuse se trouvant maintenant sous la protection des Français. » (p. 497)
« Formant un tout petit noyau à l’origine, ces hôtes parasites se sont multipliés, s’étendant subrepticement de village en village, puis proliférant à la suite du passage de la maladie4.
4. Suite aux trois épidémies successives qui ont frappé la Huronie, il y eut un accroissement notable des conversions surtout à compter de 1641. » (p. 508)
- Deux personnages principaux, Loup-Curieux, jeune Ouendat qui n’en a que pour la sécurité de son peuple, et N’Tsuk, de la tribu des Oueskarinis, dont le destin croisera celui de Loup-Curieux; innombrables personnages secondaires, Autochtones ou Européens, hommes ou femmes, gravitant autour des protagonistes par le truchement des coutumes et des échanges commerciaux.
« Ces dernières paroles rejoignent le sentiment de sécurité et de bien-être qu’éprouve Loup-Curieux face au paysage s’étendant devant lui. Il ne saurait dire pourquoi au juste la vue du village au milieu des champs l’a toujours rassuré et charmé. » (p. 63-64)
« N’Tsuk se démarquera, il ne peut en être autrement. Sa ténacité et son ingéniosité la distinguent déjà. Elle se démarquera non pas parce qu’elle sait faire tout ce qu’un garçon de son âge sait faire, mais parce qu’elle possède une volonté hors du commun. » (p. 144)
« Loup-Curieux en déduit que ce sont là les épouses de leurs hôtes et il s’attarde à celle de Lynx-des-Neiges. Plutôt jolie, elle considère son mari avec une admiration évidente, et Loup-Curieux capte dans son regard cette flamme qu’il aimerait bien voir encore dans celui d’Aonetta. Cette flamme qui, hélas, ne brille plus pour lui, mais pour Parole-Facile. » (p. 147)
« Ainsi donc, l’homme à la robe était également un marchand. Du moins, il agissait comme tel, et cela entrait en contradiction avec le fait qu’il soit sorcier, car un marchand redistribue ses richesses à sa famille, à son clan et à sa tribu, alors qu’un sorcier les garde pour lui-même. » (p. 150)
« – Champlain est le chef guerrier, la cloche est le chef du village de Kébec… » (p. 173)
« Il parlait peu et toujours en sa langue, ne faisant aucun effort pour apprendre la leur. Alors qu’avec ses fils N’Tsuk avait réappris à rire autour du feu, Loup-Curieux demeurait taciturne et songeur […] À la naissance de leur fille, elle le vit sourire pour la première fois. » (p. 558)
- Narrateur omniscient jouant deux rôles : celui bien évident de décrire ou de narrer, et celui, plus complexe, de s’immiscer dans l’esprit des Amérindiens, relatant ce qu’ils pensent, à haute voix ou intérieurement.
« Devant lui dansaient leurs filles et leurs femmes, ne portant que colliers, ceintures et bracelets. Belles, fortes et saines, elles proclamaient la suprématie de leur peuple car seuls des hommes exceptionnels peuvent être issus de tels ventres, et avoir été nourris à de telles mamelles. » (p. 46)
« – Je crois en la puissance de notre peuple, mais mon esprit ne comprend pas les Français. Ils possèdent le pouvoir d’enfermer le feu dans leur bâton, mais leurs agissements vont parfois à l’encontre de la raison… À Kébec, la maison de celui qui cultive se trouve à l’extérieur de la palissade et non à l’intérieur comme les nôtres… » (p. 176)
« – Les fourrures que nos pères et les pères de nos pères échangeaient restaient Ici… Maintenant, elles traversent le Grand Lac Salé.
Les paroles du chasseur cristallisent les inquiétudes de Loup-Curieux. La fuite de leurs fourrures à l’extérieur du pays risque de briser le cercle des échanges. » (p. 226)
« Est-ce possible de redevenir comme avant? De prime abord, il a rejeté cette idée, puis il s’est mis à l’apprivoiser. Elle le séduit à certains égards, mais à d’autres, elle lui paraît utopique. […] Pour être en mesure de repousser les Étrangers, ne faudrait-il pas que les Peuples d’Ici sachent fabriquer le fer et les chaudrons de métal? » (p. 334)
- Thèmes délicats abordés (p. ex., place de la femme ou de la fille, liberté sexuelle, image d’oppression concernant les missionnaires, torture), présentés en contexte tout en reflétant une réalité de l’époque et du milieu.
« Un lien très étroit existait entre la mère et sa plus jeune fille. Un lien qui compensait le rejet flagrant du père, pour qui cette quatrième femelle était une calamité. » (p. 76)
« Ainsi, un homme ne doit aller avec une femme qu’une fois marié à elle et ne plus jamais aller avec d’autres femmes que la sienne.
– Ne plus jamais aller avec d’autres femmes que la sienne même quand elle allaite?
– Même quand elle allaite. […]
– Comment un homme peut-il satisfaire ses besoins quand sa femme allaite?
[…] Est-ce que, dans votre village, les hommes ont cessé d’aller avec d’autres femmes que la leur et est-ce que les jeunes ont cessé de découvrir les plaisirs qu’un sexe apporte à l’autre? » (p. 203)
« Je parle comme grand-mère parce que je vois avec les yeux de nos grands-mères, que les hommes à la robe ont insultées… Dans tous nos villages, ils se sont installés à l’écart et n’ont pas reconnu le travail des femmes. Ils ont méprisé les femmes et condamné les Français qui s’accouplaient avec elles…Ils n’agissent pas comme des hommes, mais comme des sorciers. » (p. 273)
« Les séances de mutilation ont commencé. On coupe, on ampute, on cautérise avec des tisons. Loup-Curieux s’acharne sur sa victime quand vient son tour, l’attaquant dans sa chair comme il l’a attaqué dans la sienne à travers ses enfants. » (p. 468)