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Chagrin d’école

Chagrin d'école, dans la lignée de Comme un roman, aborde la question de l’école du point de vue de l'élève, et en l'occurrence du mauvais élève. Daniel Pennac, ancien cancre lui-même, étudie cette figure du folklore populaire en lui donnant ses lettres de noblesse, en lui restituant aussi son poids d'angoisse et de douleur. 

(Tiré du site de l’éditeur.)

À propos du livre

Contenu

  • Œuvre pluridimensionnelle, à la fois roman, autobiographie et essai philosophique, dans laquelle s’entremêlent des anecdotes et des réflexions liées au vécu et aux états d’âme des cancres, mais aussi des parents et des enseignants qui essaient de leur venir en aide.

    « Mon Dieu, cette solitude du cancre dans la honte de ne jamais faire ce qu'il faut! Et cette envie de fuir… J'ai ressenti très tôt l'envie de fuir. Pour où? Assez confus. Fuir de moi-même, disons, et pourtant en moi-même. » (p. 30)

    « Il est difficile d’expliquer aux parents d’aujourd’hui les atouts de l’internat, tant ils l’envisagent comme un bagne. À leurs yeux, y envoyer ses enfants relève de l’abandon de paternité. » (p. 77)

    « Ils étaient mes élèves. […] Une partie de mon métier consistait à persuader mes élèves les plus abandonnés par eux-mêmes que la courtoisie mieux que la baffe prédispose à la réflexion… » (p. 172)
     

  • Un personnage principal, l’auteur, narrateur participant, dont le rôle alterne entre celui de cancre, d’écrivain et de professeur de français; multitude de personnages secondaires, pratiquement des figurants (p. ex., les membres de la famille du narrateur, ses anciens enseignants, ses collègues, ses nombreux élèves).

    « D'où venait ma cancrerie? Enfant de bourgeoisie d'État, issu d'une famille aimante, sans conflit, entouré d'adultes responsables qui m'aidaient à faire mes devoirs… Père polytechnicien, mère au foyer, pas de divorce, pas d'alcooliques… » (p. 25)

    « Je fais un rêve. Pas un rêve d'enfant, un rêve d'aujourd'hui, pendant que j'écris ce livre. » (p. 29)

    « Une seule certitude, la présence de mes élèves dépend étroitement de la mienne : […] de ma présence physique, intellectuelle et mentale, pendant les cinquante-cinq minutes que durera mon cours. » (p. 133)

    « Il suffit d’un professeur – un seul! – pour nous sauver de nous-mêmes […]
    C’est, du moins, le souvenir que je garde de monsieur Bal. » (p. 262)

    « Excellents élèves, Kahina, Minne, Pierre, Jérôme et toi, et mon amie Françoise… » (p. 277)
     

  • Thème de la cancrerie traité avec une bonne dose d’humour et de compassion, ce qui dédramatise un peu l’inquiétude résultant de la nullité intellectuelle et laisse deviner la tendresse et la sympathie de l’auteur à l’égard de ces élèves malheureux, « réputés sans devenir ».

    « Ah! Terribles sentinelles, les majuscules! Il me semblait qu'elles se dressaient entre les noms propres et moi pour m'en interdire la fréquentation. » (p. 23)

    « Il y a ce père, agacé, qui m’affirme, catégorique :
    – Mon fils manque de maturité. […]
    Le lendemain je croise le même père dans la rue. Même costume, même raideur […]
    Mais il se déplace en trottinette. » (p. 58-59)

    « – …Qu’est-ce que tu n’arrives pas à comprendre? […]
    – La… proposition-subordonnée-conjonctive-de-concession-et-d’opposition! […]
    – …C’est elle qui te met dans un état pareil? » (p. 64)

    « Je ne crois pas avoir fait de progrès substantiel en quoi que ce soit cette année-là mais, pour la première fois de ma scolarité, un professeur me donnait un statut; j'existais scolairement aux yeux de quelqu'un… » (p. 98-99)
     

  • Structure de texte quelque peu anarchique : épilogue, placé au début de l’œuvre, suivi de tableaux de vie présentés dans un mouvement continu entre le passé et le présent.

    « Commençons par l’épilogue : Maman, quasi centenaire, regardant un film sur un auteur qu’elle connaît bien. » (p. 13)

    « C'est que je fus un mauvais élève et qu'elle ne s'en est jamais tout à fait remise. » (p. 15)

    « J'annonce à Bernard que je songe à écrire un livre concernant l'école; […] sur ce qui ne change pas […] la douleur partagée du cancre, des parents et des professeurs… » (p. 20-21)

    « J'étais une nullité scolaire et je n'avais jamais été que cela. » (p. 62)

    « Je ne me rappelle jamais le nom de ces élèves de rencontre, ni d’ailleurs leurs visages… » (p. 110)

Langue

  • Registre généralement courant, mais parfois familier; mots typiquement français (p. ex., terminale, licence, agrégation, hypokhâgne) et passages poétiques évoquant, au fil de l’œuvre, le vocabulaire de toute une vie : celui de l’élève cancre que fut l’auteur et celui du professeur écrivain.

    « Aujourd’hui que sa conscience de très vieille dame quitte les plages du présent pour refluer doucement vers les lointains archipels de la mémoire, les premiers récifs à ressurgir lui rappellent cette inquiétude qui la rongea pendant toute ma scolarité. » (p. 15)

    « Il y a la mère furibarde, convaincue que son garçon est depuis toujours l’innocente victime d’une coalition enseignante […] Il y a celle qui n’en fait pas une question de personne mais vitupère la société telle qu’elle se délite, l’institution telle qu’elle sombre, le système tel qu’il pourrit… » (p. 52)

    « …et toute son énergie mentale s'épuise à tisser un subtil réseau de pseudo-cohérence entre les mensonges proférés à l'école et les demi-vérités servies à la famille… » (p. 81)

    « Ils étaient des garçons et des filles de leur génération, loubards des années soixante-dix […] ils attrapaient des modes comme on chope des microbes. » (p. 170)

    « – Eh! On va pas aller là-bas se faire traiter de caillera par tous ces bouffons! » (p. 228)
     

  • Phrases parfois courtes, voire elliptiques, exprimant la rapidité de la pensée de l’auteur, suivies de phrases plus longues, souvent moralisatrices, laissant deviner la difficulté qu’il éprouve à expliquer le phénomène de la cancrerie.

    « Molette, clef, porte close. Molette, clef, porte close. Porte close. Porte close. On se dit qu'on n'y arrivera jamais. Et voilà que soudain, déclic, la porte s'ouvre! On en reste sidéré. » (p. 39)

    « Adolescent issu d’une cité ou d’une quelconque barre des quartiers périphériques […] électron libre mais qui se déplace en groupe, encapuchonné jusqu’au menton […] amateur d’une musique hachée aux paroles vengeresses […] Maximilien est la figure contemporaine des faubourgs d’antan; et comme naguère le bourgeois aimait à s’encanailler […] le bouffon d’aujourd’hui aime à côtoyer Maximilien, mais en image seulement, image qu’il cuisine à toutes les sauces du cinéma, de la littérature, de la publicité et de l’information. » (p. 225)
     

  • Style riche, coloré, caractérisé par l’emploi soutenu de la métaphore, souvent filée.

    « Si nous échouons à installer nos élèves dans l'indicatif présent de notre cours, si notre savoir et le goût de son usage ne prennent par sur ces garçons et sur ces filles, au sens botanique du verbe, leur existence tanguera sur les fondrières d'un manque indéfini. » (p. 70-71)

    « …nous cherchons, pour régler nos actes, l'ombre de la bonne doctrine, la protection de l'autorité compétente, la caution du décret, le blanc-seing idéologique. Puis nous campons sur des certitudes que rien n'ébranle, pas même le démenti quotidien du réel. » (p. 143)

    « Je ne sais pas ce qu'est devenu mon zozotant Philippe, archétype de l'élève friandise. » (p. 281)

    « …nous voilà occupés pour la matinée à regarder des escadrilles d’hirondelles […] il faut toujours que trois ou quatre de ces idiotes se payent les fenestrons! C’est notre proportion de cancres. Nos déviantes. On n’est pas dans la ligne. On ne suit pas le droit chemin. On batifole en marge. Résultat : fenestron. […]
    Voilà, ma métaphore vaut ce qu’elle vaut mais c’est à cela que ressemble l’amour en matière d’enseignement, quand nos élèves volent comme des oiseaux fous. » (p. 304-305)

Référent(s) culturel(s)

  • Nombreuses allusions à des auteurs et à des artistes de la francophonie internationale (p. ex., Claudel, Daudet, Hugo, Montesquieu, Rabelais, Truffaut, Vigo), à des œuvres littéraires et cinématographiques connues (p. ex., La Princesse de Clèves, Les Fables, Pensées, Les Choristes, Les 400 coups) et à des toponymes français (p. ex., la Franche-Comté, l’Ain, le Jura, le XXe arrondissement).

Pistes d'exploitation

  • Avant la lecture, demander aux élèves de rédiger un texte expressif sur les liens entre la réussite scolaire et l’estime de soi; après la lecture, demander aux élèves de revoir leur texte et de le modifier au besoin.
  • Inviter les élèves à effectuer une recherche sur les défis inhérents à l’enseignement à notre époque.
  • Après avoir lu, avec les élèves, la partie 5 du chapitre V, les inviter à rédiger leurs commentaires sur l’importance des objets et des vêtements griffés pour les adolescents.

Conseils d'utilisation

  • Avant la lecture, vérifier les connaissances antérieures des élèves au sujet du roman, de l’autobiographie et de l’essai.
  • Avant la lecture, parler aux élèves du style particulier de Pennac et du contexte français dans lequel se déroulent les événements racontés dans l’œuvre.
  • Situer le contexte de l’allusion à la décharge municipale de Djibouti (La poubelle de Djibouti) pour éviter une conception négative de ce pays d’Afrique.
  • Expliquer la blague que fait la mère de l’auteur : « Que veux-tu, toutes les Juives ne sont pas mères, mais toutes les mères sont juives. » (p. 16) pour éviter de perpétuer un stéréotype.
  • Pendant la lecture, demander aux élèves de commenter la pertinence du bulletin scolaire d’un élève en difficulté qui se trouve sur la quatrième de couverture.
  • Après la lecture, recommander aux élèves de visionner, sur le site de l'éditeur, la vidéo portant sur Daniel Pennac.
  • Inviter, en classe, des enseignants à la retraite, afin de comparer les défis de l’enseignement à des époques différentes.