- Registre de langue courant dans l’ensemble de l’œuvre; vocabulaire non familier, propre au français d'Europe (p. ex., mec, ça caille, gosses, cafte, fourguer, rancard) pouvant s’avérer un défi pour les élèves francophones du Canada; emploi de mots nouveaux que le contexte aide parfois à définir (p. ex., piaffe, péremptoire, bourrelé).
« C’était bête de dire cela, j’aurais mieux fait de me taire, de la prendre tout de suite par le cou et de la couvrir de baisers comme je l’ai fait juste après. Ma maman a de la peine et je la raisonne.
Je deviens vieux moi aussi, je fais comme les grandes personnes que je déteste parfois, parce qu’elles sont toujours à vous sermonner au lieu de vous aimer comme vous êtes. De quoi je me mêle, moi qui ne comprends rien à rien.
Je n’ai pas raconté que j’avais surpris Xavier collé à une rousse. Je ne cafte jamais. » (p. 53)
« Est-ce qu’Alice a envie de se dépayser après la terminale? Pour le moment, elle est surtout préoccupée de son allure dans la glace, pas seulement à la maison, mais en rue; je l’ai surprise se cherchant dans les vitrines. Misère! Est-ce que je comprendrai jamais quelque chose aux filles? Nadia n’est certainement pas ainsi : elle est si belle qu’elle ne peut pas en douter. Je vais lui écrire. Une lettre d’amour. Je lui dirai que. » (p. 115-116)
- Texte contenant une variété de types et de formes de phrases qui contribuent à la lisibilité de l’œuvre; emploi de phrases simples, de phrases transformées et de phrases à construction particulière.
« Je pose le plateau du thé au jasmin près de Maman et Jana. Je m’assieds près de la fenêtre à guetter quoi, qui? Surtout à rester à leur portée si elles ont besoin de moi. Est-ce que moi aussi j’aurais pu être emporté dans l’avalanche qui a avalé François? Je n’ose poser aucune question. Ce serait indécent. » (p. 29)
« Une nuit blanche, je saurai enfin ce que c’est. J’ai l’habitude des insomnies, mais là, c’est autre chose. Regarder tourner l’heure à ma montre dans la lueur faiblarde de la veilleuse, entendre les ambulances rayer le silence et semer la panique. Désormais, je les entendrai, moi qui n’y prêtais guère attention. Vivement que je puisse rentrer à la maison! Retourner en classe! Je jure que je ne me plaindrai plus jamais de rien! » (p. 126)
« Papa, sorti le premier, rapporte une brassée de fleurs qu’il disperse dans toute la maison, des bouquets sauvages qui font des taches de couleur.
– Je suis content d’être ici en été. Après cela, nous pourrons revenir en hiver sans être obsédés par.
Il ne finit pas sa phrase. François passe comme un ange.
– Oui, confirme Maman d’une voix dans laquelle tremblent des sanglots.
– Alice, si tu donnais ta chambre à Jana et que tu prenais la chambre d’amis qu’elle occupait avec, j’ai peur que… Cela t’ennuierait?
Misère! Arriverons-nous jamais à prononcer ce prénom normalement? » (p. 169)
- Nombreuses figures de style (p. ex., métaphores, comparaisons, énumérations) qui facilitent la création d’images mentales tout en ajoutant à la richesse du texte.
« Parfois Jana lâche des bribes de mots qui mélangent l’accident, le présent et le passé; on dirait la casserole à pression qui lâche sa vapeur. Elle parle en vrac. » (p. 29)
« Qu’elle est jolie. Je mange des yeux son profil fin et fier sous la mantille. Je voudrais la soutenir moi aussi, respirer son parfum, toucher, caresser ses tresses sombres. » (p. 44)
« Dans la salle du petit-déjeuner, je rechausse mes lunettes de détective. Aux murs, des filets, des ancres et, sur la cheminée, des coquillages ouverts comme de larges oreilles; on ne risque pas d’oublier qu’on est en bord de Manche.
Le patron sert et sa femme dessert. Lui est énorme; il pourrait jouer l’ogre dans Le Petit Poucet. Ses avant-bras portent des tatouages. La patronne roule de partout; je regarde ses hanches qui balancent comme une grosse barque sur la mer démontée. » (p. 108)
- Séquences descriptives qui apportent des précisions sur les personnages, les événements et les lieux.
« Je me souviens comme si c’était hier de l’arrivée de Kam dans notre classe. Plus grand que la plupart d’entre nous, maigre, mais musclé, "habillé à la Kam", comme je dirais lorsque je le connaîtrais mieux, c’est-à-dire un peu n’importe quoi qui lui va bien, et surtout pas de marques à la mode. Il a eu une remarque assassine d’un de la classe qui arborait une grande marque sur son cartable. Comme je m’étonnais de sa fureur, il a dit sobrement "Tous des pigeons!"
J’ai l’impression qu’il ne vit pas tout à fait dans le même monde que nous. Il réfléchit beaucoup. Lorsqu’un cours l’intéresse, je vois qu’il ne cille même pas, tant il est concentré. Un livre déborde toujours de sa poche. Il ne s’attarde pas après les cours, mais s’évapore. » (p. 74)
« La chambre que j’occupe donne sur la mer par une baie vitrée, aussi, à marée haute, j’ai l’impression d’être dans un bateau. Ou alors je joue à Robinson dans son île. À Paris, j’ai la chance d’apercevoir le sommet d’un arbre du boulevard et de percevoir quelques cris d’oiseaux avant le vacarme de la circulation. Ici, c’est la rumeur des vagues. Je devine qu’en hiver ou lors des grandes marées, il y a de quoi avoir peur. » (p. 141)
- Séquences dialoguées qui permettent de préciser les relations entre les personnages.
« – Quelle scène as-tu préférée, Lucas? me demande Alice, tout en savourant le bouillon que Papa nous a préparé au retour.
– Peut-être celle du dictionnaire dans lequel il se perd.
– J’en étais certaine! interrompt Maman. J’en aurais mis ma main au feu que tu choisirais celle-là. Tu aimes tant les mots.
Ah bon! aux yeux de Maman, je suis un garçon-qui-aime-les-mots. C’est vrai.
– Lire c’est vivre, dit Papa comme s’il se parlait à lui-même. » (p. 134)